Cet attentat, qui fut le dernier de la série des 9 attentats qui ont ensanglanté l'Italie en 1992-1993, est le plus méconnu de tous pour la bonne raison qu'il n'a provoqué aucune victime.
Simplement parce que, par un hasard "providentiel", le détonateur n'a pas fonctionné.
Dans le cas contraire, il aurait fait au bas mot une centaine de victimes chez les forces de l'ordre, puisqu'une Lancia Thema bourrée de 120 kilos d'explosif, de ronds d'acier et de ferraille, devait exploser au passage de deux cars de carabiniers chargés d'assurer la sécurité pour un match dominical de l'équipe de Rome au stade olympique.
Je vous laisse imaginer l'impact qu'aurait eu un tel carnage dans l'opinion publique.
Toute la préparation et l'évolution des événements ont été méticuleusement reconstituées par la première Cour d'Assise de Florence (pages 91 à 97 du jugement n° 2/2000, déposé le 20 avril 2000), qui conclut qu'est largement prouvée la certitude que l'attentat a bien eu lieu (la Corte di Assise di Firenze ha affermato di poter concludere esservi ampia e sicura prova che allo Stadio Olimpico di Roma, tra la fine del 1993 e gli inizi del 1994...).
Y compris l'identification des mafieux qui y ont participé, dont Gaspare Spatuzza, le chef mafieux actuellement repenti après plus d'une décennie de QHS, qui est en train de raconter aux juges quantité de détails sur cette époque...
Or Spatuzza était le chef du "mandement" de Brancaccio, d'abord "régenté" par les frères Graviano (voir le jugement ci-dessus, pages 118 à 155) avant qu'ils ne fussent arrêtés le 27 janvier 1994, et ce qu'il raconte aujourd'hui fait froid dans le dos...
Mais voyons d'abord quelques faits, à commencer par la date de cet attentat manqué, pas vraiment simple à identifier puisque plusieurs dates circulent, toutes comprises entre le dernier trimestre 1993 et janvier 1994, dont les deux plus souvent citées sont :
- le 31 octobre 1993, que M. Gabriele Chelazzi, substitut du Procureur national antimafia, pensait avoir identifié avec une exactitude quasiment millimétrique (quello allo Stadia Olimpico, che riteniamo di aver datato con esattezza quasi millimetrica) ;
- personnellement, dans ma chronologie je m'en suis tenu à cette version des motivations, de l'analyse des faits et du déroulement du procès devant la Cour d'Assise d'appel de Florence, où la note 704, page 372, dit ceci : « Observons que c'est bien entre le 4 et le 9 janvier 1994 que l'on doit situer l'attentat manqué au stade de Rome (Vale la pena rimarcare che è proprio tra il 4 e il 9 gennaio 1994 che va collocato il fallito attentato allo stadio di Roma). Or les matches ayant lieu le dimanche, ça ne pouvait être que le 9 janvier 1994.
Or le fait que l'attentat n'ait pas été "répliqué" a toujours été l'une des questions cruciales restées sans réponse, même si c'est probablement à mettre en relation avec l'arrestation des frères Graviano quelques jours plus tard.
En gros, certains pensent que Riina et les frères Graviano, qui étaient pour la ligne dure, ont été vendus par Provenzano dans le cadre des négociations État-mafia, d'abord menées par l'intermédiaire de Vito Ciancimino, puis reprises par Marcello Dell'Utri, que Spatuzza désigne nommément comme étant le "référent" politique de Cosa Nostra, et qui aurait "couvert" l'attentat au stade olympique : Giuseppe Graviano mi disse che per quell'attentato avevamo la copertura politica del nostro compaesano.
Et toujours selon Spatuzza, les négociations avec Berlusconi se seraient poursuivies sur plus d'une dizaine d'années, puisqu'elles auraient duré jusqu'en 2004...
Déjà, dans une lettre de chantage écrite par Vito Ciancimino (comparer l'écriture) à Berlusconi :
il s'adressait à lui en tant que président du Conseil (même si celle-ci remonte probablement à 1994, lors du premier gouvernement Berlusconi).
Une menace de parler à peine voilée, qui pourrait bien être reprise aujourd'hui par d'autres mafieux, dont les frères Graviano, maintenant qu'ils ont pratiquement perdu tout espoir de bénéficier des avantages initialement revendiqués par Totò Riina, dont certains ont été réalisés, mais pas suffisamment au goût de tous ceux qui purgent encore perpétuité...
Enfin, pour Dell'Utri, toutes ces accusations ne sont qu'un gros tas de conneries qui le font bien rire, même si à mon avis il rit plutôt jaune :
Rira bien qui rira le dernier...
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P.S. Je précise que les "accusations" de Spatuzza remplissent 75 pages, et qu'en parallèle il est jugé fiable par les magistrats puisque sa version des faits sur l'attentat de Via D'Amelio va permettre de réécrire complètement une histoire totalement bancale...
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