mardi 6 mai 2025

La quatrième révolution civilisationnelle : l'informatique quantique

Le 7 juin 2024, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté la résolution 28/287 proclamant 2025 Année internationale des sciences et technologies quantiques, inaugurée les 4 et 5 février derniers, initiative à suivre sur X avec les hashtags suivants : #IYQ2025, #QuantumCurious, #QuantumFuture, #QuantumYear, #STEMEducation (où STEM signifie Science, Technologie, Ingénierie et Mathématiques).

Une journée mondiale de la quantique ayant même été fixée au 14 avril dernier. 2025 n'a pas été choisie au hasard, mais parce qu'elle marque le centenaire de la mécanique quantique, afin de sensibiliser le public à l’importance et à l’impact de la science et des applications quantiques sur tous les aspects de la vie


Dans la troisième révolution civilisationnelle, à savoir l'intelligence artificielle, je mentionnais l'informatique quantique comme la quatrième (en ajoutant un point d'interrogation que je pense pouvoir supprimer aujourd'hui). Désormais, il ne se passe pas un jour sans que sortent des infos sur l'IQ, beaucoup d'infos.

En français, je vous conseille de vous abonner à la lettre mensuelle d'Olivier Ezratty (dernière édition du mois d'avril), ou encore de suivre l'actu autour des Maisons du Quantique (initiative HQI) : 


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En 2019, Google revendique avoir atteint la suprématie quantique avec son processeur Sycamore, en affirmant avoir réalisé en 200 secondes une tâche informatique qui aurait demandé 10 000 ans à un supercalculateur à la pointe de la technologie, une "prétention" réfutée par IBM et d'autres. Chaque année, la société a progressé ensuite, jusqu'à dévoiler sa nouvelle puce quantique, Willow, en décembre 2024, une étape cruciale depuis la création de Google Quantum AI en 2012, selon Hartmut Neven.

Quatre mois plus tard, le 26 avril 2025, Google, encore et toujours, annonce une avancée majeure dans la technologie quantique, en effectuant des calculs en quelques secondes là où ces mêmes tâches demanderaient 47 ans aux supercalculateurs traditionnels les plus avancés, tels que Frontier. Un bond en avant susceptible de révolutionner tous les domaines.

Or, quelques jours plus tôt, j'avais vu passer une "vieille" info surprenante (au moins pour moi !) : grâce à sa puissance de calcul, l'informatique "classique" (très haute performance, quand même) est en mesure d'effectuer 125 millions de milliards d'opérations en virgule flottante par seconde (125 pétaflops) de performances maximales grâce à 4000 milliards de transistors et 900 000 cœurs de calcul optimisés pour l'IA :

Le système CS-3 est conçu pour entraîner des modèles de langage 10 fois plus grands que GPT-4 et Gemini, pour ne citer qu'eux. Il s'appuie pour cela sur un important système de mémoire pouvant atteindre 1,2 pétaoctet. Par ailleurs, 24 000 milliards de modèles de paramètres peuvent être stockés dans un seul espace mémoire logique sans partitionnement ni remaniement, assure Cerebras. (...) Les configurations compactes à quatre systèmes permettent d'affiner des modèles de type 70B en une journée, tandis qu'à grande échelle, en utilisant 2048 systèmes, Llama 70B peut, par exemple, être entraîné à partir de rien en une seule journée.

(Source : L'Usine digitale). 

Où 70B signifie 70 milliards de paramètres... Du reste Meta collabore déjà avec Cerebras :

Les développeurs s'appuyant sur le modèle Llama 4 Cerebras dans l'API peuvent s'attendre à des vitesses de déploiement jusqu'à 18 fois supérieures à celles des solutions GPU traditionnelles. Une accélération qui ouvre la voie à une toute nouvelle génération d'applications, impossibles à développer avec d'autres technologies.

Donc, en mettant en relation ces deux infos, où un supercalculateur peut entraîner un modèle d'IA gigantesque en une seule journée alors qu'il lui faudrait 47 ans pour effectuer les tâches accomplies par l'ordinateur quantique de Google, j'en ai conclu que ce dernier pourrait entraîner les futurs modèles géants d'IA en quelques secondes à partir de rien !

Conclusion hâtive et inexacte, due à mon ignorance en la matière ! En faisant des recherches pour expliquer ce cas de figure tout à fait incroyable, j'ai trouvé l'article intitulé : « Informatique quantique et IA : moins compatibles que prévu ? », rédigé le 8 octobre 2024 par Filippo Vicentini (professeur assistant en intelligence artificielle et physique quantique à l'École polytechnique - IP Paris), extrait du n° 8 d'octobre 2024 du magazine Le 3,14 de Polytechnique insights.

En bref, on y apprend que les ordinateurs quantiques sont notamment très lents (!), et que seuls des calculs très courts sont effectués sans pannes. Cela étant dû au fait qu'ils sont adaptés et utiles pour les applications qui nécessitent des entrées et des sorties limitées, mais une puissance de traitement énorme, mais probablement pas pour tout ce qui concerne les données volumineuses et les réseaux neuronaux (les IA, donc) :

De plus en plus d’experts reconnaissent que les ordinateurs quantiques resteront probablement très lents lorsqu’il s’agira d’entrer et de sortir des données. Pour vous donner une idée, nous pensons qu’un ordinateur quantique qui pourrait exister dans cinq ans – si nous sommes optimistes – aura la même vitesse de lecture et d’écriture qu’un ordinateur moyen de 1999-2000.

Et M. Vicentini de conclure : « Je pense que l’IA et l’informatique quantique seront des composants différents dans une pile d’outils – complémentaires mais non compatibles. »

C'est à n'y plus rien comprendre ! À la même époque IBM nous disait qu'il pourrait y avoir convergence des deux dans l'intelligence artificielle quantique (IAQ), et que l’IAQ pourrait par exemple faire passer la durée d’entraînement des LLM (grands modèles de langage) de plusieurs semaines à quelques heures, permettant ainsi la création quasi instantanée de nouveaux assistants IA hautement spécialisés dans des sujets complexes, techniques ou même expérimentaux.

En gros, mon postulat de départ ! Donc que croire ? Qui croire ? Selon les IA à qui j'ai posé la question de la compatibilité entre intelligence artificielle et ordinateurs quantiques (je ne parle pas ici de l'utilité de la première pour les seconds, mais de la puissance de calcul quantique des seconds au service de la première), toutes ont pratiquement les mêmes réponses : bien que l'entraînement des LLM grâce à l'informatique quantique soit une perspective théorique prometteuse, cela reste un domaine de recherche en développement. Et avant que cela ne devienne une réalité pratique, probablement pas avant 10 à 15 ans, des avancées significatives sont nécessaires tant au niveau de l'hardware quantique que des algorithmes.

Or il semble qu'une équipe de scientifiques et d'ingénieurs chinois ait déjà réalisé, il y a moins d'un mois, une première mondiale dans l'intégration de l'IA et de l'informatique quantique : l'ordinateur quantique Origin Wukong devient le premier au monde à affiner un modèle d'IA à un milliard de paramètres !

Là encore, que croire, qui croire ? Sur le terrain de l'IA, il est fort probable que l'informatique quantique ne concurrence pas l'informatique classique dans l'immédiat (voire jamais), et que l'on s'oriente plutôt vers une approche hybride combinant les deux, avec une convergence progressive vers l'intelligence artificielle quantique.  

Entre-temps, autant les grands acteurs - Google, IBM, Apple, Microsoft, Meta, xAI, Amazon, Nvidia, OpenAi, etc., tous très actifs dans les domaines IA/IQ - que les gouvernements et les instances internationales, dont l'Union européenne, souhaitent placer leurs pions :

La feuille de route de Google

* La feuille de route et la vision d'IBM


* Apple se prépare à la puissance de l'informatique quantique pour des communications inviolables :

« Grâce à un chiffrement résistant aux compromissions et à des défenses étendues contre les attaques quantiques les plus sophistiquées, PQ3 est le premier protocole de messagerie à atteindre ce que nous appelons le niveau 3 de sécurité, offrant des protections de protocole supérieures à celles de toutes les autres applications de messagerie largement déployées. À notre connaissance, PQ3 possède les propriétés de sécurité les plus solides de tous les protocoles de messagerie à grande échelle au monde. » 

 * Microsoft prévient que les États-Unis risquent de se laisser distancer par la Chine, qui investit des milliards dans les technologies quantiques, en soulignant l'urgence d'une action coordonnée entre le gouvernement, le monde universitaire et l'industrie. Le groupe appelle donc à accroître le financement fédéral de la recherche, à stimuler le développement des talents quantiques et à consolider la production quantique nationale afin de maintenir le leadership technologique des États-Unis dans la course mondiale à l'informatique quantique.

* Meta accélère sur l'IA multimodale et l'agentique, alors que la société dispose déjà de l'un des supercalculateurs les plus puissants du monde, et les plus rapides : le SCR (SuperCluster de Recherche), avec une puissance de calcul atteignant près de 5 exaflops, peut effectuer un quintillion de calculs par seconde : « Pour mieux comprendre cette prouesse, il faudrait effectuer un calcul chaque seconde pendant plus de 31 milliards d'années pour égaler ce que le SCR peut réaliser en une seule seconde. »

Quant au positionnement de la société sur le quantique, Zuckerberg est plus attentiste, en déclarant que les ordinateurs quantiques étaient à plus de 10 ans de devenir utiles. Il est davantage branché sur le développement d'une intelligence artificielle générale, puisqu'il a déclaré le 30 avril, lors de la présentation des résultats trimestriels, « We are focused on building full general intelligence. » 

* Concernant Elon Musk, se quête insatiable de puissance de calcul pour xAI ne faiblit pas. Après avoir mis en libre accès le programme de son robot conversationnel Grok, intégré à X, il a annoncé en mars 2025 la fusion de son entreprise xAI avec sa plateforme X pour mieux consolider les données, les modèles et les ressources informatiques des deux équipes. En revanche, bien qu'assez silencieux sur l'informatique quantique, il a manifesté son intérêt en répondant « Wow » à un post de Sundar Pichai, PDG de Google, sur la nouvelle puce « Willow » de Google Quantum AI, avant d'échanger avec lui sur la possibilité d'installer un « cluster quantique dans l'espace avec Starship », en référence au projet de vaisseau spatial de SpaceX destiné à transporter des humains et du fret vers la Lune, Mars et au-delà. Réponse de Musk : « Cela arrivera probablement »... 

* Amazon, qui concurrence déjà Starlink de Musk dans la commercialisation de connexions satellitaires très haut débit depuis l'espace, est déjà bien présent dans le calcul quantique avec AWS, parfaitement opérationnel. La suite viendra d'elle-même !

* Nvidia, après une intrusion (au sens où personne ne s'y attendait...) dans la traduction automatique, dans les LLM (sous licence), dans la robotique et la voiture autonome, etc., a signé le 20 mars 2025 un partenariat avec Pasqal (pépite française du quantique) en vue de développer le calcul intensif quantique accéléré, en intégrant les solutions de tiers sur Cuda-Q, la plateforme de simulation quantique de Nvidia (NVAQC, basé à Boston). Après les puces les plus performantes du secteur, la société met au point ses propres unités de traitement quantique (QPU), destinées à être embarquées dans des supercalculateurs IA de pointe...

* OpenAI a lancé le projet Stargate en janvier 2025, qui prévoit d'investir 500 milliards de dollars sur 4 ans, et le déploiement d'un centre de données dédié à Abilene, au Texas, d'ici fin 2026... Aux côtés d'OpenAI, les premiers financeurs sont SoftBank, Oracle et MGX, et les principaux partenaires technologiques ARM, Microsoft, NVIDIA et Oracle.

* Les États-Unis ne sont pas en reste, d'ailleurs Trump a toujours été très actif sur le sujet (la loi nationale sur l'initiative quantique a été promulguée sous son premier mandat), et il n'y a qu'à voir la photo de famille lors de sa seconde investiture pour mieux comprendre : 

* La Darpa (à l'origine d'Internet, quand même...) a sélectionné le 3 avril 2025 pour la première phase de son programme Quantum Benchmark Initiative les entreprises retenues : Alice & Bob, Atlantic Quantum, Atom Computing, Diraq, Hewlett Packard Enterprise, IBM, IonQ, Nord Quantique, Oxford Ionics, Photonic Inc., Quantinuum, Quantum Motion, QuEra Computing, Rigetti Computing, Silicon Quantum Computing Pty. Ltd., Xanadu. Des noms connus et moins connus, mais dont l'on entendra probablement parler dans les années à venir.

* Le Canada ouvre la voie avec d’importants groupes d’expertise dans les deux domaines IA-IQ. En mars 2014, le Conseil des Académies Canadiennes (CAC) a publié un rapport intitulé « Potentiel quantique », rédigé par un comité d’experts sur l’adoption responsable des technologies quantiques. Par ailleurs, la société canadienne D-Wave, qui accompagne Google depuis 2013 (à moins que ce ne soit le contraire), a récemment affirmé avoir réalisé avec un ordinateur quantique (développé depuis déjà quelques années) une simulation qui aurait demandé un million d’années avec l’informatique classique...

* La France, qui organise le 10 juin prochain, à la Station F, France Quantum, déploie une Stratégie Nationale Quantique dans le cadre du plan France 2030, avec vocation à devenir un acteur incontournable des technologies quantiques. Les militaires également se lancent dans la course au calculateur quantique universel en se donnant les moyens de leurs ambitions (500 millions d'euros), pour développer le programme Proqcima du ministère des Armées en vue de réaliser deux prototypes français d'ordinateurs quantiques universels de 128 qubits logiques (soulignons au passage qu'en français, Qubit, phonétiquement parlant, c'est pas le top...).  

* Enfin, l'Union européenne, qui a déjà financé une initiative de recherche scientifique à hauteur de un milliard d'euros, Quantum Technologies Flagship, a adopté en 2024 la loi sur l'IA (à explorer), visant à soutenir le développement d’une IA digne de confiance, qui s'inscrit dans un cadre législatif plus ample comprenant le pacte sur l'IA, un train de mesures sur l’innovation dans le domaine de l'IA, le lancement d’usines d'IA, ainsi qu'un plan coordonné en matière d'IA, sans oublier Jupiter, le premier supercalculateur exaflopique d'Europe, dans l'attente du Jules Verne, qui devrait dépasser le seuil du milliard de milliards de calculs par seconde...

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Et ce n'est pas du quantique, mais du "classique", j'ai besoin de réfléchir ! 😀

D'autres acteurs potentiels sont Intel, Quantinuum, Rigetti Computing, China Telecom Quantum Group, IonQ, le CERN et son Open Quantum Institute, SECQAI ou semblables, mais ce sera pour une autre fois...

Dernière info : un congrès international aura lieu à Naples à la fin de l'année sur l'IAQ, du 2 au 5 novembre, « 2025 IEEE International Conference on Quantum Artificial Intelligence »

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En conclusion, il est clair que tôt ou tard la partie logicielle (l'IA, le cerveau) et la partie matérielle (l'IQ, le corps) fusionneront, avec une puissance telle que l'humanité n'a jamais rien connu de semblable depuis le Big Bang ! Le problème n'est plus de savoir si la fusion Superintelligence/Suprématie quantique aura lieu, mais quand. Cela étant, une question demeure : pour en faire quoi ?

Pour améliorer les conditions de vie de l'humanité et de la planète, ou juste pour assurer toujours davantage l'emprise stricte des quelques acteurs qui détiendront cet incommensurable pouvoir SUP² sur la multitude de celles et ceux qui en dépendront ? J'ai ma petite idée de la réponse, et elle n'est pas très optimiste...


samedi 3 mai 2025

Intelligence artificielle - Quatrième bloc

Intelligence artificielle - Premier bloc

Intelligence artificielle - Deuxième bloc

Intelligence artificielle - Troisième bloc

Les quatre blocs en PDF

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  1. L'intelligence artificielle et le marketing
  2. L'intelligence artificielle et la comptabilité
  3. L'intelligence artificielle et l'éducation
  4. L'intelligence artificielle et l'enseignement
  5. L'intelligence artificielle et la formation
  6. L'intelligence artificielle et les langues
  7. L'intelligence artificielle et la culture
  8. L'intelligence artificielle et les services publics
  9. L'intelligence artificielle et les loisirs
  10. L'intelligence artificielle et les bibliothèques

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1. L'intelligence artificielle et le marketing

Sur mon profil X-Twitter est restée la mention Translator & Interpreter | Content & Language Consultant | Branding & Web Marketing Coach for freelancers, qui témoigne de mon intérêt pour le Branding/Marketing. Entre 2008 et 2017 j'ai animé une dizaine de sessions dédiées aux professionnels des langues entre Tunisie, Italie et France, documentées sur SlideShare dans mes présentations et autre documentation (à ce jour globalement vues 200 000 fois). Mon introduction est la plus consultée :


Ainsi, en partant de tout le matériel didactique et formatif réalisé pour les langues, l'idée m'est venue de le retravailler pour en faire un guide pratique à l’intention des freelances, des consultants indépendants et de tous les professionnels libéraux travaillant en solo, mais également des TPE/PME-PMI à la recherche de pistes de réflexion et de méthodes pour promouvoir leur image et leur notoriété. En effet, les bouleversements en cours qui intéressent l'ensemble des professions libérales n'étant pas prêts de s'arrêter..., j'ai affiné SOLO² :


Déclinaison du SOHO (Small Office / Home Office), le SOLO² est un concept réactualisé du travail en indépendant, qui entend adapter une philosophie de Lean Office à une version « Small », personnalisée, en éliminant les nombreux gaspillages de temps, d’énergie et, donc, d’argent, qui caractérisent souvent la façon de travailler à domicile, et s’inspirer du branding & marketing à l’intention des auto-entrepreneurs et des professionnels exerçant en profession libérale, voire en portage salarial ou en société, qui sont ma cible de prédilection.

Toutefois ma conception du marketing reste artisanale, surtout orientée freelances. OK Boomer, me direz-vous, il serait temps de te mettre à la page !

Or le marketing n'est d'aucune utilité si vous n'avez rien à vendre : produits, services, ou votre professionnalisme. Donc a priori l'AI marketing concerne davantage les sociétés, bien que certaines applications de l'IA, orientées client, s'avèrent précieuses aussi pour les indépendants :

Côté production d'images et d'illustrations, DALL-E est un modèle d'intelligence artificielle développé par OpenAI (la même société qui est à l'origine de ChatGPT), dont le nom fusionne le D de Salvador Dalí à WALL-E (le robot de Pixar), pour symboliser sa capacité de créer des œuvres artistiques et technologiques, spécialisé dans la génération d'images à partir de descriptions textuelles

En fin de compte, le grand apport de l'IA est qu'au lieu de tout faire tout seul dans son coin, ça accélère le traitement de gros volumes d'infos en l'automatisant, y compris grâce à l'utilisation d'agents IA. Je vous laisse sur quelques lectures :
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2. L'intelligence artificielle et la comptabilité

Comme pour les autres professions, l'intelligence artificielle redéfinit les métiers de la comptabilité, dont beaucoup sont promis à disparaître, ou pour le moins à se transformer en profondeur. Dès 2013, dans The Future of Employment: How Susceptible are Jobs to Computerisation? (Oxford University), C.B. Frey et M.A. Osborne prévoyaient qu'environ 47 % du total des emplois aux États-Unis auraient dû faire face à un « risque élevé d'informatisation » au cours des deux décennies successives, à savoir d'ici le début des années 2030. 

En 2018, l'étude « L'impact de la révolution digitale sur l'emploi », de l'Institut Sapiens, classait la comptabilité parmi le top 5 des métiers en voie de disparition. Nous y sommes donc ! Selon le cabinet PWC, dans son rapport intitulé Will robots really steal our jobs?, les taux d'automatisation prévisibles menaçaient potentiellement jusqu'à 30 % des emplois au Royaume-Uni, 38 % aux États-Unis ou 35 % en Allemagne, contre seulement 21 % au Japon. 

Les services financiers seraient plus touchés que les autres secteurs par la première vague d’automatisation en cours, et l'arrivée d'outils comptables dopés à l'IA ne va certes pas tranquilliser les collaborateurs des cabinets : saisie des documents, facturation électronique, réconciliation de compte, rapprochement bancaire, automatisation des tâches répétitives, analyse des données, génération de rapports, conformité réglementaire, détection des erreurs, anomalies, fraudes, etc., toutes ces opérations autrefois chronophages ne prennent plus que quelques secondes et permettent de dessiner plus finement les tendances en cours, financières ou autres.

L'évolution est donc claire quant aux aspects difficilement remplaçables par l'IA :

  • Conseil stratégique : moins de temps consacré aux tâches mécaniques, plus d'accent sur les missions à haute valeur ajoutée
  • Jugement professionnel : les situations complexes requièrent une compréhension profonde du contexte économique et humain et une évaluation subtile des risques
  • Relation client : les dimensions humaines de confiance, d'empathie et de compréhension des problématiques spécifiques sont fondamentales pour chaque client
  • Innovation fiscale et financière : l'orientation des décisions stratégiques d'une entreprise conception et une optimisation individualisée

Une situation dont les contours étaient déjà tracés dès 2021, dans l'étude « L'attractivité et l'avenir de la profession comptable á l'horizon 2040 » du cabinet Sophos, qui indiquait : « À l’horizon 2040, les cabinets d’expertise comptable (…) seront devenus des sociétés multiservices, centrées et guidées par un objectif principal ; aider les entreprises à créer de la valeur et à piloter leur performance globale ». [Début]

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3. L'intelligence artificielle et l'éducation

L'éducation concerne l'individu en général et son développement global. Les parents éduquent (ou pour le moins devraient éduquer) l'enfant, l'adolescent (avec la collaboration de l'enseignement), puis la vie et les milieux sociaux et professionnels éduquent (ou pour le moins devraient éduquer) le jeune et l'adulte...  

Les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Leur rôle consiste à poser les valeurs et les bases humaines et affectives sur lesquelles l’école, la société et la vie viendront construire ensuite.

Que vient faire l'IA là-dedans ? En fait, pas grand chose ! L'IA n'est qu'un outil, extrêmement puissant et perfectionné, certes, mais comme tous les outils, toutes les techniques, cela dépend de qui l'utilise et comment, quand, pourquoi, dans quelles circonstances, etc.

Au niveau des parents, l'IA pourrait faciliter leur rôle de curateurs de solutions éducatives et de médiateurs technologiques pour accompagner leurs enfants dans l'appropriation et l'utilisation des mille dispositifs désormais à leur portée et les guider dans leurs usages numériques (l'avons-nous fait avec la télévision et la presse, en matière d'éducation à l'image et de décryptage de l'information ?), pour peu que les parents eux-mêmes en soient capables, ce qui est encore loin d'être évident, avec dans certains cas des renversements de situation (ce sont les enfants qui aident leurs parents à mieux maîtriser les technologies, exemple de moi et mon fils, que je consulte régulièrement pour l'utilisation de mon mobile) (perso je fais un blocage sur le smartphone et ses myriades d'applis, trop invasif à mon goût)...

Selon moi l'éducation porte bien davantage sur les composantes abstraites de la transmission des valeurs (principes moraux et éthiques), du développement de l'identité, de l'élaboration des structures mentales, de l'intériorisation des normes sociales, du développement émotionnel et relationnel, de la transmission culturelle et du sens, justement en donnant du sens à l'existence. 

Bien qu'invisible, cette dimension abstraite de l'éducation, qui façonne profondément ce que deviendra l'enfant, se transmet souvent de manière implicite, à travers l'exemple parental, les récits, les discussions adaptées à chaque âge de l'enfant qui grandit, ainsi qu'à travers les expériences significatives partagées au sein de la famille et de la communauté.

C'est pourquoi, plutôt qu'à l'éducation, je vois l'IA mieux adaptée à la formation et à l'enseignement. Du reste les enseignants ne dépendent-ils pas du ministère de l'Éducation nationale ? Or quand on voit ce qu'est devenue l'éducation aujourd'hui en France, on peut s'interroger sur le choix du terme... Je trouve la dénomination italienne d'Instruction publique beaucoup plus pertinente (quand bien même le gouvernement Meloni l'a renommé en ministère de l'Instruction et du Mérite, le choix des mots n'est jamais neutre...) !

En conclusion, l'IA est parfaite - et fortement conseillée - pour répondre aux questions que se posent les parents d'une manière générale, et plus particulièrement sur l'éducation. En revanche, dans le lien parents-enfants, son rôle se limiterait plutôt à du soutien et de l'accompagnement, car jamais elle ne remplacera la bienveillance et l'amour de la relation humaine. Par conséquent je laisse à chacun(e) le soin de choisir ses propres outils, si besoin est... [Début]

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4. L'intelligence artificielle et l'enseignement

Lorsque l'on soumet aux moteurs du Web la requête "L'intelligence artificielle et l'éducation", la plupart des résultats renvoient à l'enseignement et non à l'éducation, alors qu'en toute logique le premier est une composante de la seconde.

Dans un cadre scolaire ou universitaire, la dimension cognitive de l'enseignement se focalise sur la transmission de savoirs et de compétences techniques. Dans ce contexte, l'IA n'a pas vocation à remplacer les enseignants/professeurs, mais plutôt à les assister pour personnaliser, optimiser et enrichir les processus d’apprentissage, à travers la personnalisation d'études de cas, l'adaptive learning, les tutoriels, la génération de quiz, de scénarios pédagogiques ou d'articles conçus par l'IA, la création de contenus en général (texte, images et autres...).

Comme dans beaucoup de domaines, nous allons donc vers une hybridation enseignement-IA, où le soutien de l'intelligence artificielle aux enseignants passe par la correction automatisée, la gestion des classes, l'analyse des besoins, voire l'accessibilité et l'inclusion pour les porteurs de handicaps (reconnaissance vocale pour les malentendants, synthèse vocale pour les malvoyants, ou traduction en temps réel pour les élèves allophones, etc.), l'enseignement dans des zones reculées (plateformes diverses) ou l'apprentissage immersif (IA + réalité virtuelle).

En bref, l’IA permet de transformer la façon d’enseigner, avec potentiellement un fort impact sur le rôle des enseignants, et de nouveaux enjeux, de nouveaux défis, de nouveaux dangers...

Quelques conseils et règles simples à respecter : explorer et tester les outils, en allant des plus simples aux plus complexes (pour la plupart, des tutoriels existent pour faciliter l’auto-formation) ; intégrer progressivement l'IA en classe, en commençant à utiliser ces outils en situation réelle avec les apprenants, tout en prévoyant des solutions alternatives pour pallier d'éventuels dysfonctionnements

Une dernière question : qui formera les enseignants ? [Début]

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5. L'intelligence artificielle et la formation

Les objectifs de l'enseignement sont les savoirs théoriques, ceux de la formation l'acquisition de savoir-faire et le développement de compétences pratiques dans des contextes professionnels ou techniques. On se forme soit pour un métier, soit pour se mettre à niveau et conserver son employabilité si on en a déjà un. La formation peut se dérouler dans des centres de formation professionnelle, des entreprises, des organisations, des ateliers, des lieux d'enseignement, ou via des programmes de développement personnel, des mises en situation (FEST), des séminaires, des stages, le e-learning, le tutorat, etc. Elle peut être continue, en alternance, à distance, programmée, etc., en vue d'acquérir de l'expertise, des soft skills, d'apprendre l'adaptabilité et la résilience..., cela dépend de différents facteurs : niveau d'études initial, objectifs professionnels, contraintes de temps et de budget, style d'apprentissage de chacun(e), et ainsi de suite.

L'IA intervient essentiellement pour personnaliser les parcours d’apprentissage, et améliorer l'engagement des apprenants. Il incombe à chaque responsable en charge de dispenser la formation de s'adapter aux contextes, aux équipes, et de considérer l'IA comme un outil pédagogique, non comme une solution miracle. Une entreprise peut également décider d'intégrer l'IA en interne pour former ses collaborateurs ou leur servir d'assistant numérique, voire de coach personnel.

Quelques liens pour vous inciter à approfondir :

Bonne lecture ! [Début]

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6. L'intelligence artificielle et les langues

En général, dans le binôme "intelligence artificielle et langues", il est question d'apprentissage/enseignement des langues (essentiellement vivantes, mais pas seulement), et donc des ressources que l'IA peut mettre à disposition des élèves/enseignants. Pêle-mêle :
Autres ressources documentaires :

Enfin, on ne peut mener une réflexion sur l'intelligence artificielle et les langues sans évoquer Duolingo et Google...

Je m'étais intéressé à Luis von Ahn il y a plus de 10 ans dans une de mes présentations, diapositive n° 35 intitulée « Apprendre gratuitement les langues en traduisant le Web » :


La société, devenue depuis l'un des acteurs incontournables de l'apprentissage des langues, vient juste de lancer 148 nouveaux cours de langue élaborés à partir de l'IA :
Developing our first 100 courses took about 12 years, and now, in about a year, we’re able to create and launch nearly 150 new courses. This is a great example of how generative AI can directly benefit our learners. This launch reflects the incredible impact of our AI and automation investments, which have allowed us to scale at unprecedented speed and quality.
En gros, « Nous avons mis à peu près 12 ans pour développer nos 100 premiers cours, et tout juste un an pour lancer près de 150 nouveaux cours : c'est là un formidable exemple des avantages de l'IA générative pour nos apprenants, et cela témoigne de l'impact exceptionnel de nos investissements dans l'IA et l'automatisation, qui nous ont permis d'évoluer à une vitesse sans précédent et avec une qualité remarquable. »

Sa nouvelle devise est AI-first ! Ça doit être un partisan de MAGA (Make AI Great Again)... Dans la foulée, il a donc viré 10% de ses salariés. Voici la lettre qu'il leur a adressée :

L'avant-dernier paragraphe est intéressant : 
Ceci étant dit, Duolingo reste une entreprise qui se soucie profondément de ses employés. Il ne s'agit pas de vous remplacer par l'IA. Il s'agit de supprimer les goulots d'étranglement afin de pouvoir exploiter pleinement les personnels exceptionnels dont nous disposons déjà. Nous souhaitons d'abord que vous vous concentriez sur le travail créatif et les problèmes concrets, plutôt que sur des tâches répétitives. Nous allons donc vous accompagner en vous proposant davantage de formations, de mentorat et d'outils pour exploiter l'IA dans le cadre de vos fonctions.
Un joli petit tableau que Google vient chambouler en annonçant trois outils d'apprentissage des langues basés sur l'IA (Tiny Lesson, Slang Hang et Word Cam). Et Google, c'est ... Google !
  • Tiny Lesson est conçu pour une acquisition de vocabulaire ciblée. Les utilisateurs choisissent une langue et un thème (voyages, gastronomie, affaires) et reçoivent instantanément une liste de mots pertinents, accompagnée d'extraits audio et de définitions.
  • Slang Hang offre aux utilisateurs un aperçu du langage courant en simulant des conversations réelles intégrant l'argot local (toutefois, Google met en garde les utilisateurs contre toute inexactitude éventuelle générée par l'IA).
  • Word Cam est un outil de traduction d'images amélioré permettant à l'internaute de prendre des photos de scènes du quotidien. Les objets contenus dans ces images sont instantanément étiquetés dans la langue choisie, alliant ainsi le contexte réel à l'enrichissement du vocabulaire.
Pour l'heure, ces outils ne sont ouverts à l'exploration que sur la plateforme expérimentale de Google (certaines options prenant même en charge des dialectes régionaux). Or si l'avenir de cet écosystème en évolution n'est pas encore totalement assuré, son existence signale d'ores et déjà une accélération vers des systèmes d'apprentissage interactifs et adaptatifs.

La bataille des langues entre dans une nouvelle phase, et la concurrence pour les solutions telles que Duolingo et les autres va être rude (notamment avec l'arrivée d'un nouvel acteur : NVIDIA !)... [Début]

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7. L'intelligence artificielle et la culture

Dès 2020, une mission « Intelligence artificielle et culture », commanditée par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA), a produit un rapport « fruit d’une réflexion menée à partir d’auditions, de contacts informels et de nombreuses lectures », selon ses auteures, Alexandra Bensamoun (professeure à l’Université de Rennes 1) et Joëlle Farchy (professeure à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne).


Je signale ce rapport à toutes fins utiles, car il aborde très largement les problématiques juridiques, certes incontournables, mais ce n'est pas du tout l'angle d'approche que je privilégie. Je suis plutôt branché "culture et création", et donc sur le rôle de l'IA, entre imitation et innovation culturelle, dans la production culturelle et la création liée à toute forme d'expression (art pictural, musique, cinéma, littérature, etc.), d'où les questions de la place de l'artiste / du créateur dans la chaîne et de la pertinence de l'intervention humaine dans le processus créatif.

Ainsi que sur leur corollaire : la "consommation" de culture (la consommation culturelle inclut tous les biens et services acquis pour satisfaire les besoins liés à la culture), que l'on appelle fréquemment aujourd'hui la "culture de masse" (comprendre les choix : 600 pages de thèse !)...


Le mode de production influant le mode de consommation, et réciproquement, dans une boucle évolutive où l'IA intervient - et interviendra de plus en plus - à tous les niveaux, en tenant compte du fait que la culture n'est pas, a priori, un objet de consommation comme les autres, et qu'elle génère un comportement des consommateurs toujours plus complexe :
À l’heure actuelle, on observe l’existence d’un « homo consumericus de troisième type », c’est-à-dire un « turbo consommateur flexible » (décalé, mobile) totalement libéré des anciennes cultures de classe, imprévisible dans ses goûts, à la recherche d’expériences émotionnelles et de mieux-être, de qualité de vie, d’authenticité, d’immédiateté.

D'autre part, il est désormais notoire que l'IA, pour entraîner ses moteurs, est à la recherche permanente de données qui ne lui appartiennent pas mais qui ont été créées par d'autres, les véritables titulaires des droits... Donc la transparence des fabricants d'IA dans l’utilisation des contenus qu'ils "pompent", outre devenir si possible un "levier de rémunération" pour les auteurs (j'ai observé que les robots conversationnels d'IA indiquent toujours plus fréquemment les sources de là où ils vont puiser leurs raisonnements), est en fait une véritable reconnaissance de la paternité des contenus.

Côté consommateurs, bien que, potentiellement, toutes et tous aient "librement" et "gratuitement" accès à la culture, qui s'est considérablement démocratisée, en réalité de nombreuses fractures (pas seulement numériques) entre classes sociales et générations entravent cet accès. Il devrait y avoir un nivellement par le bas, au sens positif, où la base de la pyramide des utilisateurs devient toujours plus large et inclusive. Car dans la réalité, aujourd'hui nous assistons plutôt à une IA dominante de sens contraire, avec une « homogénéisation culturelle forcée engendrée par les outils d’IA, essentiellement entraînés avec des textes écrits en anglais à l’aide d’algorithmes rédigés en langue anglaise, qui sont conçus pour des contextes propres aux économies avancées et alignés sur les valeurs de ces dernières. » 

Il s'ensuit que les outils et services d’IA s’adaptent souvent mal aux environnements des cultures et des pays non anglophones, et que leurs résultats dans les langues locales laissent beaucoup à désirer. Cette situation entame la confiance dans l’IA et ralentit son adoption par celles et ceux qui se trouvent du mauvais côté de la fracture numérique grandissante.

Alors qu'au contraire l'IA devrait contribuer activement à éliminer ces fractures, ou pour le moins à les atténuer, en facilitant dans toutes les langues un accès équivalent aux œuvres et à la production culturelle lato sensu.

En France, Mistral.ai tente de réduire le biais anglo-saxon de l'IA. [Début]


8. L'intelligence artificielle et les services publics

L'IA pourrait bien moderniser les services publics, MAIS, ne pas confondre vitesse et précipitation : les annonces tonitruantes des politiques d'un côté, la réalité du terrain de l'autre...

J'ai déjà traité dans mes quatre blocs le rapport entre IA et nombre de ces services publics (éducation, santé, sécurité, droit, transports, etc.), mais pas encore de la contribution, par l'intermédiaire de l'IA, de l'État, des collectivités locales ou d'autres entités publiques et administratives au déploiement de ces services, dont quelques-unes des caractéristiques principales sont les suivantes :
  • Intérêt général (réponses à des besoins collectifs de la société) 
  • Accessibilité [destinés à l'ensemble des citoyen(ne)s, indépendamment de leur situation psycho-physique,  géographique, financière ou sociale]
  • Qualité (normes de qualité minimales pour en assurer l'utilité)
  • Continuité et amélioration continue (services fournis de manière régulière et constante, sans en compromettre la fourniture, même en cas de perturbations ou de crises, y compris via la dématérialisation)
  • Adaptabilité [selon les évolutions de la société et les besoins changeants des citoyen(ne)s] [le paradoxe étant qu'il y a parfois renversement de l'adaptabilité des services publics vers l'adaptabilité des usagers, qui doivent être capables de faire les démarches en ligne parce que le progrès prend ce sens (nombre d'usagers ne pouvant bénéficier des services publics s'ils ne s'adaptent pas, d'où le concept de "maltraitance institutionnelle"...)]
  • Efficacité (capacité des prestataires publics d'atteindre les objectifs fixés en utilisant les ressources de manière judicieuse)
  • Responsabilité (des prestataires publics)
Si l'on en croit le Conseil d'État, l'IA et l'action publique doivent construire la confiance et servir la performance, en permettant d'assister l’humain dans des tâches impossibles à réaliser jusque-là...

Et puisque l'on parle de l'État, à côté des services publics, il y a aussi les services régaliens, à savoir ses missions et prérogatives essentielles, indispensables à l'exercice de sa souveraineté et à la garantie de l'ordre public :
Je les mentionne uniquement par souci de précision, car cela sort des visées (modestes) du présent billet. Je terminerai en signalant une récente publication de la CNIL sur le sujet (notamment ses recommandations relatives à l'emploi) :

[Début]

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9. L'intelligence artificielle et les loisirs

Qu'il s'agisse du divertissement ou du tourisme (activités menées pendant le temps dont on peut librement disposer en dehors de ses occupations et contraintes habituelles), une récente étude indique les loisirs les plus populaires en France en 2024 :


En clair, par ordre d'importance :
  1. Les voyages, le tourisme
  2. Les livres et la lecture
  3. La musique
  4. Le jardinage
  5. Les spectacles, le cinéma, le théâtre, les concerts, etc...
  6. Le bricolage
  7. L'aménagement et la décoration de la maison
  8. L'actualité sportive ou le sport
  9. L'actualité politique et sociale
  10. La mode, les vêtements
  11. Les sciences
  12. L'actualité économique et financière
  13. Les techniques, en général ou dans certains domaines
  14. Les arts (peinture, sculpture, gravure, photographie d'art)
Sans fournir de liens à chaque fois sur "IA et ceci" ou "IA et cela", je vous propose de saisir vous-même les requêtes "IA + secteur" dans les moteurs et d'analyser les nombreux résultats (signe que l'IA est désormais omniprésente dans tous les domaines) ou, mieux encore, de tester directement les IA ci-dessous :
avec le prompt suivant (ou l'invite, si vous préférez) :
« Quel est l'impact de l'intelligence artificielle sur la cuisine [ou l'un des 14 secteurs ci-dessus] »
Et d'étudier ensuite les réponses, y compris les sources, lorsqu'elles sont mentionnées, puis de comparer (aussi bien entre les IA qu'entre les résultats des IA et ceux des moteurs de recherche). J'en ai fait moi-même l'expérience et je vous en parle au point suivant... [Début]

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10. L'intelligence artificielle et les bibliothèques (livres et documentation lato sensu)

Au Canada et, au-delà de ses frontières, partout dans le monde :
L'IA aide les bibliothèques à relever des défis complexes et à répondre aux besoins changeants des chercheurs, des éducateurs et des étudiants, dans des domaines tels que l’analyse de données, la découverte de ressources et les services personnalisés aux utilisateurs. En adoptant ces innovations, les bibliothèques de recherche jouent également un rôle essentiel dans la promotion d’approches éthiques et inclusives de l'IA...
L'exemple de la BNF est particulièrement parlant à cet égard :
Plus de 40 millions de documents de multiples natures (livres, manuscrits, cartes, partitions, objets, documents sonores et jeux vidéo) dans les magasins physiques de la Bibliothèque, près de 9 millions de documents numérisés et accessibles dans Gallica, 15 millions de notices dans le catalogue général, 40 milliards d’URL collectées dans les archives de l’internet : ces chiffres donnent une idée de l’immensité des gisements documentaires sur lesquels la Bibliothèque veille. Face à une telle volumétrie, l’IA ouvre aux bibliothécaires comme aux publics de nouvelles voies vers l’intelligibilité des collections. 
Des chiffres impressionnants ! Voici pour terminer une présentation d'Alice Bernard (conseillère numérique France Services à la bibliothèque départementale d’Indre-et-Loire, et formatrice), intitulée « Les intelligences artificielles en bibliothèque » :


Voilà. Je préfère m'arrêter là. 

En concluant cette série de quatre blocs sur l'Intelligence artificielle par une expérience, vécue en préparant ce billet, et ce dixième point en particulier. Durant mes recherches de matériel sur les bibliothèques, je suis tombé sur ce passage de Umberto Eco :
« C’est une absurdité de croire qu’il faille absolument lire tous les livres que l’on achète, tout comme il est ridicule de reprocher à quelqu’un d’acquérir plus de livres qu’il n’en pourra jamais lire dans une vie. Ce serait comme dire qu’il faut utiliser tous les couverts, tous les verres, tous les tournevis ou forets que l’on possède avant d’en acheter de nouveaux. Il est des choses dans l’existence dont il faut toujours disposer en abondance, même si l’on n’en utilisera qu’une infime partie. Prenons les livres comme des remèdes : mieux vaut une armoire pleine de soins que quelques fioles esseulées. Le jour où l’âme vacille ou vacille le cœur, on ouvre alors cette armoire — non pas au hasard — mais pour y choisir le livre juste, celui qui saura panser, éclairer, relever. D’où l’importance de toujours avoir un vaste éventail de choix. Celui qui n’achète qu’un seul livre, le lit, puis s’en débarrasse, ne fait qu’appliquer à la lecture une logique de consommation. Il traite le livre comme une simple marchandise, un bien de passage. Mais ceux qui aiment les livres savent qu’ils ne sont rien de tout cela. Un livre n’est pas un produit. C’est une présence ».
dont l'authenticité a été mise en doute en adressant une demande de vérification à Grok :

Voici la réponse de Grok :

La citation attribuée à Umberto Eco semble apocryphe. Après vérification, aucune source fiable, y compris ses œuvres, discours ou le documentaire *Umberto Eco : A Library of the World*, ne confirme qu’il l’ait dite ou écrite. Bien que le propos reflète ses idées sur les livres, notamment sa notion d’« antilibrairie » et son amour des bibliothèques, les mots exacts ne sont pas authentifiés. Il est donc probable qu’Eco n’ait pas formulé cette citation ainsi.

Intrigué, j'ai décidé de demander la même vérification (en français et en italien) à d'autres IA, dont voici les réponses (sans préciser qui a répondu quoi, et en quelle langue) :

1.

La citation que vous mentionnez provient du livre N’espérez pas vous débarrasser des livres, un recueil de dialogues entre Umberto Eco et Jean-Claude Carrière. Dans cet ouvrage, Eco exprime sa vision personnelle de la lecture et de la collection de livres, soulignant que l'acquisition de livres ne doit pas être motivée uniquement par l'intention de les lire tous, mais plutôt par le plaisir d'avoir un large éventail de choix à disposition. Il compare les livres à des remèdes, suggérant que, tout comme une armoire pleine de médicaments peut être utile même si l'on n'en utilise qu'une petite partie, une bibliothèque bien fournie offre des ressources pour nourrir l'esprit aux moments opportuns.

Cette perspective met en lumière l'importance de la diversité et de la richesse des livres dans une bibliothèque personnelle, et critique une approche consumériste de la lecture qui se limiterait à lire un seul livre à la fois avant de s'en débarrasser.

Pour une exploration plus approfondie de cette philosophie, vous pouvez consulter le livre N’espérez pas vous débarrasser des livres, disponible sur des plateformes telles que Babelio. [En citant plusieurs sources, dont celle-ci.] [J'ai vérifié personnellement, et contrairement à ce qu'affirme l'IA, aucune mention de ce texte n'est faite dans le livre cité]

2.

Cette citation d'Umberto Eco provient de son livre "Cette chaire n'est pas une pipe" [Alternative : Comment voyager avec un saumon. Nouveaux pastiches et postiches]

3.

Cette citation d'Umberto Eco provient de son essai "De Bibliotheca" (ou "La bibliothèque" en français), écrit en 1981. Dans ce texte, Eco réfléchit sur la nature des bibliothèques, leur utilité et leur signification culturelle.

Ce discours a été prononcé à l'origine lors de l'inauguration de la bibliothèque municipale de Milan. Eco y développe sa vision sur la relation entre les lecteurs et leurs livres, défendant l'idée qu'une bibliothèque personnelle abondante n'est pas un signe d'ostentation mais une nécessité intellectuelle - une sorte de pharmacie de l'esprit où l'on peut trouver le remède approprié quand le besoin s'en fait sentir.

Cette réflexion s'inscrit parfaitement dans la pensée d'Eco, qui était lui-même un collectionneur passionné de livres et possédait une immense bibliothèque personnelle. Sa vision du livre comme objet culturel dépassant largement sa dimension commerciale est une constante dans son œuvre. [J'ai vérifié le discours prononcé lors de l'inauguration de la bibliothèque municipale de Milan, et cela n'a rien à voir avec la citation]

4.

Cette citation souvent attribuée à Umberto Eco circule largement sur internet, notamment dans des articles et discussions sur la bibliophilie, mais elle ne figure pas textuellement dans ses œuvres publiées. Elle semble plutôt être une reformulation libre inspirée de ses idées sur les livres et la culture, mélangée à des ajouts poétiques.

Origine probable : Un mélange d'inspirations

Umberto Eco était un grand bibliophile (il possédait plus de 30 000 livres) et a souvent défendu l'idée qu'une bibliothèque personnelle est un "antidote à l'oubli", un outil de recherche bien plus qu'une simple collection de livres lus.

Dans De Bibliotheca (1981, conférence), il compare les livres à des "remèdes" et évoque l'importance d'avoir une réserve de savoir à portée de main.

Dans Sur les épaules des géants (2017), il parle des livres comme "outils" qu'on ne consulte pas toujours, mais dont la présence est essentielle.

La métaphore des couverts/outils ressemble à des propos tenus par d'autres auteurs (comme Anatole France ou Jorge Luis Borges), mais elle a été popularisée sous le nom d'Eco.

La version exacte de la citation semble issue de forums ou blogs (années 2000–2010), où des lecteurs ont synthétisé ses idées avec une touche littéraire.

Citations vérifiables d'Umberto Eco sur le sujet

En voici une, plus authentique :

« La bibliothèque est une sorte de cerveau artificiel qui multiplie nos possibilités de mémoire. On n’a pas besoin d’avoir lu tous les livres, mais ils doivent être là, comme une pharmacie où l’on trouve le remède au bon moment. » (De Bibliotheca, 1981)

Pourquoi cette confusion ?

Eco a souvent parlé de l'accumulation culturelle et du rôle des livres comme "objets potentiels" plutôt que consommables.

Le style de la citation apocryphe est proche de sa pensée, d'où son attribution erronée.

Conclusion

La citation est inspirée d'Eco, mais reformulée de manière créative. Pour retrouver sa vraie pensée, mieux vaut se plonger dans ses essais (De Bibliotheca, Sur les épaules des géants) ou ses interviews.

Le saviez-vous ? Eco disait aussi : "Un livre non lu est plus utile qu’un livre lu, car il représente une possibilité infinie." (idée reprise par Tzvetan Todorov).

*

Je vous fait grâce des autres réponses. Résultats :

  1. La numéro 1 est fausse.
  2. La numéro 2 propose faussement deux livres où la citation n'est pas mentionnée.
  3. La numéro 3 est fausse, y compris la circonstance de la bibliothèque municipale de Milan.
  4. La numéro 4 est vraie.
En fait, j'ai demandé à 5 IA, qui m'ont fourni 4 réponses fausses, et 1 vraie. Si l'on y ajoute celle de Grok, également vraie, cela me donne au final 6 IA consultées4 réponses fausses et 2 vraies. La problématique est la suivante : lorsque vous consultez une IA, comment déterminer si les réponses qu'elle vous fournit sont fausses ou vraies ? Il en va donc de l'IA comme de tous les médias en 2025, ne jamais rien donner pour acquis, mais vingt fois sur le métier, recouper, recouper, et recouper encore les infos et les sources ! [Début]

À suivre...