vendredi 6 juillet 2007

Netvibes en manque de communication (de crise)

Netvibes en manque de communication (de crise)

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Netvibes est en crise, c'est clair, Tariq le visionnaire est peut-être trop en avance sur son temps et Pierre le gestionnaire peut-être trop en retard sur son programme. Je dis peut-être car je n'en sais absolument rien. Mais comme les personnes qui savent se taisent, à l'image d'Emmanuel (qui se contente de pointer vers ce billet tout en soulignant que l'analyse est imprécise...) ou d'Ouriel (qui pour l'instant ne souffle mot de la chose), dur dur dans ces conditions de se faire une opinion sensée. Et même si l'info a été signalée par Loïc Le Meur, membre du directoire de Netvibes, si je ne m'abuse, ce n'est pas pour autant qu'il nous a proposé un semblant de début d'analyse.

La tentative de Thierry Bézier de nous présenter la fin du monde Netvibes a le mérite de fixer les choses et d'expliquer qu'indépendamment des motifs, ça tombe vraiment à un mauvais moment avec l'arrivée de Bubbletop et la percée de Frank Poisson, qui ne dit rien non plus mais « s'empare doucement de l'agrégation RSS sur mobile avec les Widget Mobile Webwag », selon AccessOWeb qui en rajoute une couche dans l'univers Netvibes part en morceaux. Et ce n'est pas Marc Thouvenin qui dira le contraire...

Donc en essayant de mettre de l'ordre dans mes idées pour tenter de dégager au moins une perspective, j'ai dû rapidement revenir en arrière pour voir la chronologie de l'affaire.

Développé par Florent Frémont, lancé mi-septembre 2005, Netvibes aurait commencé sa courbe de croissance exponentielle avec 15 000 adhésions le jour même de son lancement, 600 000 utilisateurs fin 2005, avant de passer à 4 millions en mai 2006, à 5 millions en août, en doublant à 10 millions en mai 2007, probablement près de 12 millions aujourd'hui, ... mais en recul de moitié sur les 20 millions d'utilisateurs prévus pour fin 2006 par Pierre Chappaz lorsqu'il a rejoint la société.

Donc voilà peut-être une première réponse au désenchantement. Malgré les incontestables succès de Netvibes, une croissance moins soutenue que prévu, qui s'ajoute sûrement aux divergences cruciales signalées par Pierre dans son annonce, portant sur :
  1. la stratégie de distribution et de monétisation
  2. les Univers (quelques jours après la la fête pour l'annonce du 500ème...)
  3. le modèle d'affaires
Autant dire sur tout ce qui compte ! Et de plus, il s'agit de désaccords anciens.

Or il me semble que j'ai trouvé un indice de ces désaccords dans le bout d'interview de Tariq que Thierry nous repropose :


Nous sommes face à une réinvention profonde de l'Internet, ..., la page Web a atteint ses limites, ..., ça remet en cause toute l'économie du Web, toutes les relations, ..., puisque aujourd'hui une grande partie de l'économie est basée sur le fait que ce sont les éditeurs qui contrôlent ce que tu vois, ...
En fait, sa vision consiste à dire qu'avec l'appropriation de son espace virtuel par l'internaute via sa page personnalisable, c'est désormais lui qui va contrôler l'info dont il veut disposer "chez lui", et non plus les éditeurs des sites qui pourront lui imposer leur contenu.

Une vision qui peut probablement expliquer pourquoi Tariq ne croit pas aux formes de monétisation actuelles, si j'interprète correctement la situation bien que je n'aie aucun autre élément à disposition que ce que l'on peut trouver çà et là sur le Web.

Déjà, en janvier dernier, Franck Perrier s'interrogeait sur « où sont les revenus ? » et il est clair qu'avec plus de 12 millions de fonds levés dans cette histoire, les investisseurs risquent vite de s'impatienter vu la tournure que prennent les événements. Et Tubbydev de se poser la question à 12 millions d'euros : « À qui les investisseurs de Netvibes vont-ils réussir à refiler la patate chaude ? » AccessOWeb avance une réponse...

Certes, cette affaire du business model est au cœur de tout projet solide et, de gré ou de force, Tariq va devoir préciser sa pensée non seulement aux yeux des investisseurs, mais également devant le Web mondial et devant les utilisateurs de Netvibes en premier. Il va surtout devoir s'inventer un avenir, sous peine de devenir du passé. Un peu comme Technorati, toutes proportions gardées.

C'est ça aussi le Web, tout va tellement vite que ce qui était hier un succès planétaire peut fort bien ne plus rien valoir demain (demandez à Murdoch ce qu'il pense aujourd'hui de Myspace...), même si personnellement je trouverais dommage qu'une success story telle que Netvibes finisse en eau de boudin.

Et je précise que je ne suis pas utilisateur de Netvibes. Pour conclure, si j'avais un conseil à donner à Tariq Krim, ce serait de rapidement mettre en place une communication de crise, car tout le monde veut savoir ce qui se passe, et vite. Ce qui est tout à fait naturel et légitime pour un service aussi populaire.

Donc Tariq, si tu ne veux pas perdre la main et laisser le champ libre aux rumeurs les plus insensées, explique-nous sans tarder ce qui se passe et ce à quoi nous devons nous attendre dans les jours et les semaines qui vont venir...

Ce serait aussi un bon moyen de fidéliser encore davantage des utilisateurs qui ne demandent que ça !

[MàJ - 17h45'] Tariq vient de s'exprimer sur NetEco mais je reste un peu sur ma faim. Ça me rappelle un "vieux" commentaire... On n'est pas loin de la langue de bois, tendance discours politique qui prétend rassurer sans rien dire, sauf insister sur la notion d'équipe comme pour mieux la reserrer autour de soi. Est-ce que ça suffira à mobiliser tout le monde ?

En outre, si vous souhaitez approfondir, je vous conseille de voir absolument cette vidéo sur le site de Rodrigo Sepulveda, je suis bluffé par la différence entre l'impression positive qui s'en dégage et le sentiment plutôt négatif qu'on a aujourd'hui, alors que quelques jours seulement séparent ces événements...


P.S. Et si vous voulez suivre l'actu sur Netvibes, rien de tel que de vous abonner aux flux de ... Wikio  :-)

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3 commentaires:

Anonyme a dit…

Je comprends que tu restes sur ta faim suite à l'intervention de M.Krim sur Neteco.
Ce qui est incroyable d'ailleurs, c'est que dans le même article, Jérome Bouteiller dit que Netvibes possède 360 000 visiteurs uniques et Tariq que Netvibes a "des millions d'utilisateurs".
Personne ne remarque rien ;-)

Anonyme a dit…

Concernant les chiffres c'est l'éternele histoire des mesures par panel contre mesure "site centric".
Le probleme c'est que je n'arrive pas à mettre la main sur les chiffres de Comscore qui visiblement ne sont pas publics. Je ne peux donc vérifier s'il s'agit de l'audience USA ou France seulement, j'ai de gros doutes sur ce point.
Quant à la valorisation donnée par Challenges je e demande bien d'où elle sort mais je doute qu'elle soit basée sur la mesure Comscore je serais plutot prêt à parie sur l'éternel multiplicateur à la Youtube c'est à dire 50$ fois X millions de UU. Du bluff dasn tous les cas.

Unknown a dit…

Merci Jean-Marie pour ton commentaire sur mon blog, j'y ai répondu :)

Puisqu'ici tu parles du "fond" de l'affaire, et pas de la forme comme je le fais moi, voici ma petite contribution ;) Perso, ce que je trouve effarant, ce n'est pas tant qu'on se retrouve aujourd'hui sur un site sans réelle politique de monétisation, c'est surtout qu'il aie été possible de réunir un tour de table pareil sur un business plan sans aucune stratégie financière autre que les "visions d'un gourou de l'internet".

Ca me rappelle vraiment les plus sales heures du Web 1.0. J'espère bien entendu que NetVibes ne soit pas en si mauvaise posture qu'on peut le supposer, mais une débâcle de leur part serait vraiment gravissime, vu l'image de la société par rapport au mouvement "web 2.0" actuel. La bulle 1.0 a été déclenchée par quelques dossiers clés, comme Boo.com, un netvibes aurait sans doute des effets aussi dévastateurs..

Sur un plan plus positif, un YouTube en 2006 était tout aussi inquiétant, voire pire (menaces de procès des Majors, etc..), et ils se sont pourtant fait racheter par Google au prix fort, qui s'est chargé d'inventer "la monétisation qui va avec". Est ce le but de Krim ? l'avenir le dira :)