mardi 15 juillet 2025

IA : le déclin des moteurs de recherche

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En 2010, dans un billet intitulé « Les chercheurs du Web de 3e génération », l'ami Laurent, un vieux de la vieille du SEO, avait demandé à plusieurs blogueurs (dont moi), de nous exprimer sur l'avenir du search en nous basant sur l'étude “Search of the future” publiée en décembre 2009 par Directpanel, sous-titrée : le moteur de recherche idéal vu par les internautes.

Je citais en préambule une série de trois billets, inspirés par Gord Hotchkiss, respectivement intitulés :
  1. Search Engine Results 2010
  2. Les moteurs de recherche innovent, pourquoi les marketers Web n’en font-ils pas autant ?
  3. Moteurs de recherche 2010
Dans ce dernier, je terminais ainsi la série :
La conclusion de ce qui précède est qu'il faut donc penser en termes de multipositionnement, non plus simplement sur le texte mais sur tous les éléments du palimptexte, une réalité qui n'a jamais existé jusqu'à présent, et dont nous avons encore bien des difficultés à appréhender toutes les implications pour notre présence Internet...

Ce n'est plus de simple écriture Web qu'il s'agit, mais plutôt d'ingénierie "scripturale" (linguistique, sémantique, technique, etc.). Interactive, et donc réactive. Adaptative. Selon les buts, les retours d'information, les événements, les destinataires, etc. Sans parler de localisation...

(...) Pour conclure, je vous laisse avec cette question : où sera positionné votre site sur la page de résultats de Google en 2010 (ce n'est qu'une projection, mais on comparera dans trois ans...) ?
*

Quinze ans plus tard, la question n'est plus vraiment d'actualité ! Car il est clair que les moteurs de recherche ne sont plus aussi pertinents qu'avant, à l'heure où le bon vieux SEO (Search Engine Optimization) laisse progressivement la place au GEO (Generative Engine Optimization) :
L'optimisation pour les moteurs conversationnels inclut le prompt engineering (créer des contenus qui anticipent les prompts des utilisateurs) ou encore la production de contenus difficiles à reproduire par l’IA, autrement dit des contenus qui se démarquent par leur rareté, leur profondeur humaine ou leur ancrage dans le réel, de sorte que les modèles d’intelligence artificielle ne peuvent pas les générer ou les imiter facilement.

En 2025, la nouvelle donne ne consiste plus seulement à séduire les moteurs de recherche classiques mais plutôt à rendre le contenu d'un blog ou d'un site accessible, compréhensible et utile pour les robots conversationnels (chatbots IA, assistants, modèles RAG, moteurs IA natifs, etc.).

Désormais, une grande partie du trafic Web passe par les agents conversationnels, qui ne fonctionnent plus comme Google : ils recherchent de la pertinence contextuelle, n’affichent pas de listes de liens, utilisent des modèles sémantiques, souvent basés sur la RAG (Retrieval-Augmented Generation).

En permettant d'accéder à des données récentes, cette technique de pointe fournit des réponses plus pertinentes, une capacité que de nombreux LLM pré-entraînés n'ont pas. Imaginez que vous gérez un géant de la vente en ligne comme Amazon. Vos clients posent fréquemment des questions sur les produits. Avec un inventaire en constante évolution, il est totalement impraticable de ré-entraîner un chatbot en permanence. C’est là que la génération augmentée par la récupération intervient, en récupérant rapidement les informations depuis votre base de données ou de connaissances pour générer ensuite une réponse à partir de ces informations. Cette approche réduit non seulement les coûts d’entraînement, mais garantit également une adaptation fluide aux données dynamiques des entreprises modernes.

Lorsque je publiais Écrire pour le Web : quand vos lecteurs sont des moteurs…, il y a près de 20 ans, je n'imaginais pas qu'un jour les moteurs de recherche seraient devenus si vite obsolètes ! Aujourd'hui le bon titre serait Écrire pour le Web : quand vos lecteurs sont des IA !

En fait écrire un article IA-friendly signifie produire un contenu pensé pour être compris, utilisé, référencé ou synthétisé efficacement par une intelligence artificielle (qu’il s’agisse d’un moteur de recherche IA, d’un robot conversationnel ou d’un outil de résumé automatique). Cela implique des choix de forme, de structure et de fond qui maximisent la lisibilité par les humains et la pertinence pour les IA :

1. Contenu structuré et hiérarchisé

  • Utilisation claire de titres (H1, H2, H3)avec des mots-clés bien formulés.
  • Paragraphes courts, bien découpés.
  • Listes à puces, tableaux comparatifs, définitions.

2. Langage explicite et informatif

  • Éviter le flou, les phrases creuses ou trop abstraites.
  • Privilégier un style pédagogique.
  • Définir les termes clés dans l’article, même s’ils semblent évidents.

3. Ancrage contextuel et actualité

  • Mentionner des dates, tendances, faits récents.
  • Citer des sources ou outils reconnus (ex. : McKinsey, Perplexity, Statista, Gartner...).

4. Optimisation sémantique

  • Utiliser les cooccurrences naturelles autour du sujet (ex. pour "IA", employer aussi : modèle de langage, machine learning, automatisation, hallucination, etc.).
  • Employer le champ lexical attendu par les IA (enrichir sans "bourrage de mots-clés").

5. Inclure des formats digestes pour IA

  • TL;DR (résumé en début ou fin).
  • Q&R : sections sous forme de question-réponse.
  • Encadrés explicatifs ou citations de sources.

En résumé, un article IA-friendly est clair, structuré, riche en contexte, optimisé sémantiquement, et aligné avec les tendances de l’écosystème IA, dans le but d'être capté, synthétisé ou cité par des outils IA — ce qui améliore votre visibilité dans un monde où les lecteurs sont aussi des machines.

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Comment en est-on arrivés là ? Parce que nous sommes passés du moteur de recherche au moteur de réponse : avant, les moteurs comme Google proposaient une liste de liens à explorer. A présent, grâce à l’IA générative, les utilisateurs reçoivent des réponses directes, synthétisées et contextualisées.

Cela génère moins de clics vers les sites Web, les utilisateurs restant dans l’interface de l’IA pour obtenir l’information qu'ils souhaitent. Une interface utilisateur qui évolue : au lieu de taper des mots-clés, on pose des questions complètes ou on engage un dialogue avec une IA, l'interaction devient conversationnelle.

Le SEO traditionnel, basé sur les mots-clés et le positionnement dans les SERP, est devenu moins central, d'où la nécessité d'optimiser le contenu pour l’IA, et plus seulement pour les moteurs classiques. Quant aux moteurs basés sur l’IA, ils peuvent adapter leurs réponses à l’historique, aux préférences ou au contexte de l’utilisateur, en fournissant des résultats plus subjectifs, contextuels et dynamiques, ce qui remet en cause l’idée de « classement universel » des résultats. Rappelez-vous les débuts de Yahoo!

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En produisant des réponses synthétiques, les IA, qui citent parfois leurs sources, et parfois non, court-circuitent les sites sources. Cette désintermédiation du Web génère moins de trafic vers les sites Web classiques, menace le modèle économique des éditeurs de contenu (publicité, affiliation), et exige de repenser les stratégies de visibilité en ligne.

De nouveaux écosystèmes de recherche se créent, des alternatives à Google gagnent du terrain, comme Perplexity AI, You.com ou Brave Search (avec réponse IA intégrée), ou des assistants comme ChatGPT avec navigation web, Gemini, Copilot, etc. Désormais la recherche est multi-plateforme et multi-agent. Le “search” se déplace vers les applis, les robots conversationnels, les OS, voire les objets connectés.

Pour autant, ce nouveau panorama n'est pas exempt de risques : hallucinations (les réponses peuvent être fausses ou biaisées), opacité (la provenance de l’information devient floue), dépendance (il devient plus difficile de vérifier ou de diversifier ses sources), etc. Et tant que les outils d'IA n'améliorent pas la transparence et la citation des sources, c'est à l'utilisateur qu'il incombe d'adopter une posture plus critique.

En clair :

Avant (Web classique)Après (Recherche avec IA)
Liste de liensRéponse directe
Mots-clésLangage naturel
Résultat fixeRésultat dynamique
SEO centré sur GoogleOptimisation multi-agent
Clics vers les sitesInteraction dans l’IA


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