vendredi 11 juin 2010

Italie : quand la loi viole le droit


Depuis hier l'Italie est en deuil, tout comme la démocratie. L'aspirant dictateur Silvio Berlusconi a fait passer une loi par un "vote de confiance" du sénat italien qui menace et viole le droit constitutionnel plus élémentaire et foule aux pieds les principes du droit communautaire européen, dont l'Italie est l'un des membres fondateurs encore faudrait-il le rappeler à cet énergumène.

Aujourd'hui la une du journal La Repubblica est une grande page blanche, ornée d'un post-it qui dit ceci :
la loi-bâillon dénie aux citoyens le droit d'être informés

Pour le quotidien Il Fatto, il s'agit d'une loi criminelle pour les criminels, dont le seul but est de dissimuler à l'opinion publique les innombrables corruptions et complicités mafieuses dont se rendent coupables les politiques de tous bords, droite, gauche et centre confondus, qui "esclavagisent" le pays sous leur emprise.


Un seul exemple (parmi des centaines...) : Nicola Cosentino, coordinateur régional du parti de Berlusconi pour la région Campanie (Naples), est l'actuel secrétaire d'état à l'économie et aux finances, en charge du CIPE, le Comité Interministériel pour la Programmation Economique, pratiquement l'organisme qui tient les cordons de la bourse pour tous les grands chantiers de l'État.

En novembre 2009, les juges ont transmis à la Chambre des députés une demande d'incarcération pour Nicola Cosentino, accusé de favoriser la camorra décrite par Roberto Saviano dans Gomorra, demande d'incarcération confirmée par la Cour de Cassation le 28 janvier 2010, mais le parlement italien n'a pas autorisé l'arrestation de Cosentino et ses démissions ont été refusées par Silvio Berlusconi lui-même.

Il continue donc de gérer les caisses de l'Etat italien en toute tranquillité et impunité...

C'est d'ailleurs l'impunité qui est le but ultime de la loi votée hier au sénat, une loi "ad personam" de plus, pour que les corrompus puissent continuer à corrompre et à être corrompus, pour que les mafieux et leurs complices politiques puissent continuer à faire leurs magouilles et à prospérer sur le dos des citoyens honnêtes sans être dérangés par les juges, la presse et l'opinion publique.

Aujourd'hui Silvio Berlusconi n'est plus seulement un danger mortel pour la démocratie en Italie, il y a lurette que l'Italie ignore ce qu'est la démocratie, mais c'est un véritable danger pour l'Europe entière.

Non, l'Italie n'est pas un pays normal, et ce n'est pas un gag.

Il est temps que je commence à penser à l'exil...

Édito de Repubblica en italien :


(le titre du billet s'inspire de cet article)


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P.S. Le modèle le plus accompli de cette dérive politique italienne, outre Berlusconi, est celui de son éminence noire, Marcello Dell'Utri, déjà condamné à plus de 9 ans de prison pour association externe à la mafia et dont le procès d'appel est sur le point de se conclure, qui avoue dans un inhabituel élan de sincérité :
« je me fous complètement de la politique, je suis juste candidat pour ne pas finir en prison »...
Voir ici une traduction de l'interview du "sénateur" !

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2 commentaires:

Agnès L. a dit…

JM dit: "Il est temps que je commence à penser à l'exil... "
NON! Déjà que le moral est à zéro... si tu dis ça toi aussi... :-((

Jean-Marie Le Ray a dit…

Agnès,

Si l'Italie continue à s'engager dans la voie du fascisme berlusconisant qui fait avaler de la merde à tout le pays en faisant croire aux gens que c'est du chocolat, et les gens d'applaudir et de trouver ça bon, je ne vois pas d'autre alternative que de quitter ce pays que j'aime tant et où je vis depuis 28 ans.
Si j'étais seul, je l'aurais déjà fait.
Mais avec ma femme et mon fils, c'est pas simple du tout.
Ajourd'hui, mon dilemme cornélien, c'est : est-ce que je dois prendre le risque de faire grandir Paul dans un pays qui n'est plus en mesure de lui assurer un avenir démocratique ?
Et puis franchement je suis en colère avec la passivité des italiens. Tu prends un troupeau que tu conduis à l'abattoir et ils chantent, ces connards.
Si on m'avait prédit qu'à 53 balais j'assisterais à l'émergence d'un nouveau fascisme mafieux en plein coeur de l'Europe, en 2010, jamais j'aurais pu croire, ni même imaginé, un truc pareil.
Et pourtant, c'est sur ce cauchemar que j'ouvre les yeux tous les matins, pour me rendre compte que le cauchemar n'est pas dans les rêves mais dans la réalité.
Tu m'enfermerais dans un asile ça serait pas pire.
Maudit Berlusconi !!!