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samedi 12 juillet 2008

Flickr, crowdsourcing, Web 2.0 et modèles économiques...

Flickr, crowdsourcing, Web 2.0 et modèles économiques...

Dans un billet publié sur Wired en juin 2006, qui est à l'origine du concept de « crowdsourcing, ou contribution communautaire », le journaliste, Jeff Howe, explique le fonctionnement du site iStockphoto, qui propose un fonds photographique à environ 1$ la photo, fort de la contribution de quelque 22 000 photographes amateurs (le cap des 2 millions a été franchi il y a un an...), en concluant ainsi :
Comment voulez-vous concurrencer des photos à 1$ (“But how can I compete with a dollar?”) ?
Et 5$ pour un clip de 30 secondes !

C'est très simple : en puisant à volonté dans les inventaires de photos gratuites, dont le plus célèbre et le plus fourni est aujourd'hui, sans conteste, Flickr (qui ne représente toutefois qu'une minuscule portion de l'inventaire d'images sur le Web, et sans compter Facebook, car pour ce qui est des conditions d'utilisation, bonjour la souplesse...).

Et Jeff Howe de poursuivre qu'en février de cette année-là, Getty Images, à l'époque la plus grosse agence photos du monde avec plus de 30% des parts de marché, faisait l'acquisition d'iStockphoto.com pour 50 millions $, en rapportant cette déclaration de Jonathan Klein, PDG de Getty Images :
Si quelqu'un est sur le point de cannibaliser votre métier, mieux vaut l'intégrer dans l'un de vos autres métiers.

“If someone’s going to cannibalize your business, better it be one of your other businesses”.
À la lumière de cette déclaration, prononcée il y a deux ans, on comprend mieux pourquoi Getty Images vient juste de signer un contrat avec Flickr (Yahoo!), dans le cadre duquel, lorsque les accords seront finalisés, les utilisateurs sélectionnés de Flickr pourront être rémunérés par Getty au même tarif que celui appliqué aux photographes contractuels.

Soit entre 30 et 40% du tarif facturé par Getty pour les images dont les droits sont sous licence, compris dans une fourchette de 500 à 600$ pour une période temporelle limitée, et une cinquantaine de dollars pour les images sans droit exclusif d'utilisation. Si ça vous intéresse...

Jonathan Klein, toujours lui, réitère :
Nous pensons que l'inventaire de Flickr est un ajout important au mix de notre offre.

“We believe that Flickr will be an important addition to the mix that we have”
.
Vu les chiffres annoncés par The Register pour Flickr (54 millions de visiteurs mensuels dans le monde, plus de deux milliards de photos d'inventaire et 27 millions de membres, à comparer avec les chiffres d'iStockphoto.com ci-dessus), on le comprend !

Il précise d'ailleurs que cet accord pèsera peu sur les finances du groupe, mais qu'il est extrêmement significatif au plan stratégique (Klein said the deal "financially for us is not significant, but it's strategically extremely important").

D'autant plus lorsqu'on a une idée des circuits qu'empruntent les marchés de la photographie :


Source : Nathalie Moureau, Dominique Sagot-Duvauroux.

* * *

Il y a quelques jours, par le plus grand des hasards, je tombe sur cet article de Libération, qui parle de la baisse de l'immobilier dans plusieurs villes de France. Mon regard, attiré par cette magnifique photo d'un immeuble parisien :


sursaute en lisant la légende : Luc Legay / http://www.flickr.com/photos/luc/950353487/ (ne cherchez pas le lien actif sur l'article de Libé, il n'y est pas, c'est moi qui vient de le rajouter).

Or connaissant Luc dans le cadre des Explorateurs du Web, surpris, je le contacte en lui demandant s'il en sait quelque chose. Voici un extrait de ses réponses, qu'il m'a autorisé à citer (c'est moi qui souligne) :
Jean-Marie,

On dirait bien que les médias ont compris l'intérêt d'utiliser —gratuitement— les millions de photos en CreativeCommons disponibles sur Flickr

Ce qui m'étonne le plus c'est que je suis très loin de produire des photos de qualité pro… j'utilise un appareil qui coûte moins de 200 euros… et les médias soient prêts à sacrifier en qualité pour se tourner de plus en plus vers du gratuit.
Au delà de l'avenir des médias eux-mêmes, l'avenir des agences photos me parait bien sombre.

(...)

Pour l'image Libé… je n'étais pas au courant.
Ce n'est pas la première fois, loin de là, mais habituellement les "pompeurs" me préviennent via un mail ou un message dans Flickr.
Visiblement mon statut de photographe amateur (pour ne pas dire de simple touriste) ne fait pas peur aux éditeurs ;-)

Bien à toi.
Toujours désireux d'approfondir, je vois sur Flickr que la licence choisie par Luc pour sa photo est la suivante :


Paternité-Partage des Conditions Initiales à l'Identique 2.0 Générique, qui précise :
À chaque réutilisation ou distribution de cette création, vous devez faire apparaître clairement au public les conditions contractuelles de sa mise à disposition. La meilleure manière de les indiquer est un lien vers cette page web.
Or si Libé a respecté la paternité en mentionnant le nom de Luc, l'article ne donne aucun lien actif, ni vers la photo ni vers la licence, pas plus qu'il ne précise « clairement au public les conditions contractuelles de sa mise à disposition » !

Et pour être tout à fait complet, signalons que j'ignore totalement si ce même article a paru sur la version papier du journal, avec la même photo ? Donc voilà.

En observant qu'ici, on ne parle pas du blogueur du coin mais de Libé, l'un des premiers quotidiens de France. Que les personnes autorisées et plus compétentes que moi en tirent les conclusions qu'elles jugeront nécessaires...


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P.S. Pour répondre à Luc, qui s'étonne de ce qu'il est « très loin de produire des photos de qualité pro… » et que « Visiblement (s)on statut de photographe amateur (pour ne pas dire de simple touriste) ne fait pas peur aux éditeurs », laissons la parole à Jonathan Klein :
Nombre de clichés, qui n'ont pas été pris pour des services commerciaux, sont plus authentiques. Or l'authenticité, c'est que les annonceurs recherchent.

Because the imagery is not shot for commercial services, there is more authenticity. Advertisers are looking for authenticity.
À l'instar des clichés, nous voici fixés...

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samedi 28 juin 2008

Crowdsourcing : contribution communautaire

Le crowdsourcing, ou la contribution communautaire

Dans le cadre de la réflexion que je mène sur Web 2.0 et modèles économiques, et notamment sur la nécessité d'inverser la traîne, le crowdsourcing occupe une place de choix.

Il est difficile de traduire ce terme, souvent influencé par le contexte dans lequel il se trouve, au croisement de l'externalisation (outsourcing) et de la foule (crowd), même s'il me semble que sa signification et sa portée s'étendent de plus en plus.

Personnellement, je le définirais par "contribution communautaire", vue comme apport de contenu volontaire, plus ou moins gratuit ou intéressé, c'est selon. En outre cela touche un nombre considérable d'activités sur Internet, de la photographie à la cartographie, en passant par la traduction, l'encyclopédie et l'innovation au sens large, etc.

En fait, je pense que s'estompent chaque jour davantage les contours entre contenu généré par l'utilisateur (UGC), contribution communautaire (crowdsourcing), pro-am, Internet participatif et Web social dans leur ensemble, autant de concepts qui témoignent cependant d'une tendance commune, d'une orientation partagée, de plus en plus destinées à jouer un rôle clé dans l'évolution d'Internet.

J'aime assez le modèle FLIRT créé par Sami Viitamäki en deux versions successives :


FLIRT signifie :
  • Focus
  • Languages
  • Incentives
  • Rules
  • Tools
Focus, Langues, Incitations, Règles, Outils, voilà tout un outillage des coopérations qui ne saurait nous faire oublier que le Web coopératif, il faut le vouloir !

D'abord et avant tout. Comme l'observe Narvic :
Les outils sociaux du Web 2.0 sont très utiles pour cela, mais il faut des volontaires... et des volontés. Où va-t-on les trouver ?
Et de proposer de redonner la voix aux créateurs, ce qui me rappelle un excellent billet de Josh Catone, où il constate que les foules sont meilleures pour valider les contenus que pour les créer (Crowds are better at vetting content than creating it).

Un avis contrastant apparemment avec celui de Chris Sherman sur la recherche sociale, qui « fait de plus en plus parler d'elle, mais (qui) en dépit de cet engouement (...) n'est pas prête à remplacer la recherche algorithmique traditionnelle ».

Ici la question des créateurs est centrale, même si la fameuse règle des 1% tend à confirmer la théorie d'Hubert Guillaud et Daniel Kaplan, selon laquelle un web massivement relationnel n'annonce pas par définition un monde massivement coopératif.

Il n'empêche, l'homme est un animal social...

* * *

Pour ma part, je pense que tous ces concepts sont à la fois très riches et trop nouveaux, très riches et porteurs d'implications de toutes sortes, mais trop nouveaux pour qu'on puisse encore bien en saisir les degrés, les interdépendances et ... les conséquences !

Tant à court terme qu'à moyen-long terme.

À noter enfin que le pendant du crowdsourcing serait le slavesourcing cher à Nicholas Carr, dans une confluence « vers un monde meilleur, où les machines externalisent l'universel slavesourcing crowdsourcing de l'intelligence et du travail humains » (en attendant The One Machine...), une variante de ce que Narvic appelle en bon français la sagesse du troupeau.

De quoi se demander si la sagesse des foules appartient vraiment aux foules...

Donc pendant que je tente de progresser dans ma vision des choses (c'est quand même assez compliqué, tout ça), laissez-moi vous proposer la lecture d'un document intitulé Le crowdsourcing, une intermédiation hybride du marché, par Cédric Pélissier, dont je vous livre la conclusion en espérant vous donner l'envie de lire le PDF (25 pages) :
Le crowdsourcing est un de ces nouveaux phénomènes issus du web 2.0, une nouvelle organisation qui se développe et s’implante sur la toile. Le modèle crowdsourcing compose aussi avec les outils du web. Cet univers est un prolongement des communautés web, de l’open source, de l’open innovation, etc. Cette nouvelle construction sociale nécessite désormais d’intégrer ces nouvelles formes d’échanges dans les constructions théoriques autour de l’open source, de l’open innovation et plus généralement autour des processus de collaboration et de gouvernance. Ces premiers résultats nous montrent qu’il faut dépasser les logiques dualistes entre marchandisation des entreprises et militantisme des communautés, mais plutôt prendre en compte l’ensemble des dimensions et rationalités qui s’entrecroisent dans ces nouveaux univers. Il est nécessaire de penser d’emblée ces modèles comme des modèles hybrides.
« Dépasser les logiques dualistes entre marchandisation des entreprises et militantisme des communautés » : vaste programme...


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