dimanche 30 septembre 2007

Le circuit communicationnel de la traduction


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Traduction = Communication
Le circuit communicationnel de la traduction
Conclusion : choisir un prestataire de service digne de ce nom

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Traduction = Communication

Je commence ce billet en me citant moi-même dans Communication : les projets d'avenir du Studio92.eu :
Et surtout, grâce à Internet, le moment est venu que la traduction devienne enfin ce qu'elle est depuis la nuit des temps : communication pure...
- Question aux entreprises : confiez-vous votre communication au premier venu ?
- Réponse : non, jamais.

- Question corollaire : confiez-vous vos traductions au premier venu ?
- Réponse : oui, souvent.

- Pourquoi ce hiatus ?
- Parce qu'une large majorité de clients pensent encore - contre toute logique, sinon la logique du portefeuille - qu'il suffit de baragouiner une langue avec plus ou moins de bonheur pour savoir traduire.

C'est ainsi qu'ils n'hésitent pas une seconde à confier leur documentation institutionnelle, voire leur correspondance commerciale, à des soi-disant traducteurs ayant pour seul mérite d'être les moins-disants, avec comme seul critère d'attribution du marché le prix le plus bas possible...

En passant outre les compétences et la qualité, et en ignorant totalement que la traduction est une opération complexe, qui suit son propre circuit communicationnel. [Début]

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Le circuit communicationnel de la traduction

Je vais donc tenter de clarifier les choses en vous proposant une explication de ce qu'est, selon moi, le véritable circuit communicationnel de la traduction, en m'inspirant à ma manière de diverses théories de la communication et en détaillant chacune des étapes. En septembre 2004, j'avais mis au point l'illustration suivante :


En bref, en mixant plusieurs modèles de communication, vous avez :

1. une source d'information (qui)
2. un message à transmettre sous forme de signal (dit quoi)
3. un émetteur qui va coder le signal (comment)
4. un canal de transmission qui va véhiculer le signal (par quel canal)
5. un récepteur qui va décoder le signal pour recomposer le message et restituer l'information qu'il contient (à qui)
6. un feedback, ou rétroaction (avec quel effet en retour)

Or lorsqu'on parle de communication interpersonnelle, on donne généralement pour acquis qu'il y a compréhension entre émetteur et récepteur parce qu'ils parlent la même langue. Un postulat faussé dès le départ lorsqu'ils parlent deux langues et que l'un ne comprend pas celle de l'autre. Soit le lot quotidien d'environ 7 milliards de terriens dans une infinité de lieux et de circonstances !

Donc si l'on met de côté les aspects techniques pour nous concentrer sur le cheminement entre l'émission d'un message en langue A par son auteur et sa réception en langue B par son destinataire - ce qui est une définition de la traduction -, nous obtenons les correspondances suivantes en termes de communication :

1. une source d'information (qui) (auteur)
2. un message à transmettre sous forme de signal (dit quoi) (message en langue A)
3. un émetteur qui va coder le signal (comment) (codage en message source)
4. un canal de transmission qui va véhiculer le signal (par quel canal) (traduction)
5. un récepteur qui va décoder le signal pour recomposer le message et restituer l'information qu'il contient (à qui) (destinataire du message cible décodé en langue B)
6. un feedback, ou rétroaction (avec quel effet en retour) (y a-t-il perte - ou gain - d'information, satisfaction ou insatisfaction sur la qualité du message traduit)

Première observation : d'aucuns pourraient s'étonner que je place la langue entre l'auteur et le message source, ou entre le message cible et le destinataire.

L'explication est simple : pour le créateur, ou pour le traducteur, il n'y a jamais UNE SEULE façon de coder son message, puisque chaque langue autorise de nombreuses variantes de codage, ce qu'on appelle le registre de la langue. Entre "veuillez partir s'il vous plaît" et "casse-toi", le message est le même mais la formulation diffère quelque peu...

Le codage du message source - et cible - change donc en fonction des buts de la communication, des destinataires, des lieux, des circonstances, etc. Les critères sont multiples. Interviennent aussi le bruit (ce que j'appelle le parasitage linguistique, comme par exemple une mauvaise maîtrise de la langue, du style, de la syntaxe, de la grammaire, de l'orthographe, etc.) et les filtres (culturels, religieux, familiaux, sociaux, etc.), susceptibles de modifier ou perturber la clarté de l'information. Ainsi, chaque message est influencé par une infinité de variables, conscientes ou non.

Il n'est pas rare qu'un ingénieur, un avocat, un médecin, etc. - tout expert dans son domaine -, ne sache pas s'exprimer correctement dans sa langue. Un traducteur qui exerce le métier depuis longtemps a sans aucun doute des centaines d'exemples à sa disposition, où il finit par produire un texte d'arrivée nettement plus intelligible que le document de départ.

Quant au processus de TRADUCTION proprement dit, qui se base sur les compétences intrinsèques du traducteur ET sur les aspects techniques que représentent la localisation et/ou la traduction assistée par ordinateur (ça peut aller de la traduction automatique sur les moteurs aux environnements d'aide à la traduction, de la gestion terminologique à l'exploitation des mémoires de traduction, du bitexte ou du corpus multilingue au glossaire en ligne et au moteur spécialisé, etc.), c'est le canal qui va permettre de véhiculer le message d'une langue à l'autre.

Dans une opération de mise en équivalence du message - et non pas des termes, ou des mots (distinguo d'une importance cruciale que j'ai détaillé dans une analyse de la traduction technique professionnelle) -, qui consiste pour les traducteurs à augmenter « l'élasticité de la langue », à former « des ponts entre les peuples », dixit Victor Hugo...

Vous remarquerez enfin sur mon graphique les deux coupures qui peuvent éventuellement interrompre le message, soit en amont si l'intégrité de l'information ne passe pas entre message source et message cible pour cause d'incompréhension, de mauvaise traduction, etc., soit en aval dès lors que le destinataire du message n'est pas capable de juger l'adéquation entre source et cible, ou qu'il s'en fout complètement, ce qui n'est pas rare non plus. :-)

Ceci étant, sur le curseur qui va de la satisfaction à l'insatisfaction, il peut y avoir mille situations selon la compétence / l'incompétence des uns et des autres... [Début]

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Conclusion : choisir un prestataire de service digne de ce nom

Voilà. Donc si votre PME fait partie des entreprises européennes qui « subissent de fortes pertes commerciales, faute de disposer de compétences linguistiques suffisantes », et si par un heureux hasard, vous y êtes prescripteur de traductions et que vous avez eu le courage et la patience de lire jusqu'ici, j'ose espérer que vous confierez votre prochaine traduction ou la localisation de votre site corporate à un prestataire de service digne de ce nom.

Comme Translation 2.0, par exemple (mais c'est juste un exemple :-).

Car sachez qu'en règle générale, la qualité d'une traduction finit toujours par être proportionnelle au prix qu'on la paye - ou qu'on est disposé à la payer. La communication multilingue est un métier, et comme tout métier, ça ne s'improvise pas ! [Début]


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4 commentaires:

JFPINEAU a dit…

>>Car sachez qu'en règle générale, la qualité d'une traduction finit toujours par être proportionnelle au prix qu'on la paye - ou qu'on est disposé à la payer.

*finit toujours*
Tu as mille fois raison de le formuler en ces termes. On peut faire illusion quelque temps comme traducteur avec des tarifs au ras du sol et une qualité très acceptable. Mais pas dans la durée.


>>avec comme seul critère d'attribution du marché le prix le plus bas possible...
Oui, il faut sortir de cette logique infernale du prix comme premier, voire seul critère de choix du fournisseur.
D'où la nécessité de se distinguer des fournisseurs à bas coût
- en augmentant la valeur ajoutée apportée à nos clients
- en soignant notre image
- en professionnalisant notre communication
- en étant curieux de ce qui se passe en aval et en amont de notre activité
- en prenant l'air, aussi, pour préserver l'équilibre entre vie privée/vie professionnelle et avoir le recul nécessaire sur notre activité
- etc.
C'est un bréviaire qu'il faudrait rédiger ! :-)

Merci pour ce billet, Jean-Marie, encore excellent.

Jean-François

Jean-Marie Le Ray a dit…

Jean-François,

Merci pour ton commentaire, on a jamais trop échangé via les forums, mais aujourd'hui par blog interposé, c'est sympa.

"en prenant l'air, aussi, pour préserver l'équilibre entre vie privée/vie professionnelle et avoir le recul nécessaire sur notre activité"

- c'est une question vraiment délicate, et j'avoue que c'est l'un des aspects les plus difficiles à gérer...

J'ajouterais un point à ta liste :

- "en faisant un travail de pédagogie constant"

Je crois que l'absence de visibilité quasi-chronique dont souffre la traduction - et, partant, dont souffrent les traducteurs - est en partie de leur faute.

Les places de marché et autres lieux où se rencontrent les traducteurs sur Internet sont utiles, ils nous permettent d'élargir notre réseau et de rencontrer des gens de qualité, mais je suis intimement convaincu que la profession doit absolument s'ouvrir vers l'extérieur (pas seulement les "clients", mais aussi vers les non-traducteurs) pour expliquer sans cesse notre métier.

Les mots et les langues intéressent des millions de personnes qui ne seront jamais traducteurs, mais c'est une erreur de notre part de ne jamais dialoguer avec les gens pour les informer de ce qu'est la traduction et sensibiliser le grand public sur les secrets trop gardés de notre métier.

C'est en partie ce que j'essaie de faire dans ce blog, en ne parlant pas que de ça, certes, tout le monde s'en lasserait, mais de temps en temps quand même...

Reviens plus souvent !

Jean-Marie :-)

Sara a dit…

Le tarif bien entendu ne garantit pas la qualité de la prestation, mais c'est vrai qu'à un tarif trop bas on peut s'attendre à des mauvaises surprises (agence qui n'arrive pas à avoir le "bon" traducteur pour un travail donné en raison d'un tarif irréaliste, etc.). Travailler en direct avec un traducteur ou avec une équipe de traducteurs au "bon" tarif augmente les chances d'avoir une qualité régulière (voire croissante) dans la durée. Sans les mauvaises surprises qui peuvent coûter très chères à une entreprise (erreur ou non qualité découverte alors que l'imprimeur attend votre document pour LE grand salon de l'année dans lequel vous avez investi des dizaines de milliers d'euros...et j'en passe). Merci pour ce billet très juste et très intéressant.

Jean-Marie Le Ray a dit…

Sara,

Merci :-)

Les ingrédients pour faire bouillir la marmite sont aussi très intéressants...

Jean-Marie