Süßes oder Saueres (allemand)
Bonbons ou bobos / Farce ou bonbons (français)
Treta o trato (espagnol)
Ce n'est pas une fête "traditionnelle" pour les grands, mais c'est en train de le devenir pour les petits (rendons d'ailleurs à César ce qui appartient à César ;-). Je n'ai pas pris de photos de mon fils aujourd'hui, mais ça valait le coup d'œil...
Comme toujours quand on s'intéresse aux mots et à leur traduction, il est intéressant de voir comment les cultures ont importé la tradition du « Trick or treat ».
Une expression qui a la caractéristique d'associer en anglais deux mots courts, assonants, qui riment presque.
Donc il est évident que l'adaptation de la formule dans une langue doit avoir un peu les mêmes critères. Ce que font l'italien et l'allemand, où il semble y avoir consensus sur la traduction par "Dolcetto o scherzetto" et "Süßes oder Saueres". Par contre, ça se complique en français et en espagnol. [Début]
Français
En Googlant pour voir les traductions françaises plus courantes, il ne m'a pas semblé en trouver une qui emporte l'adhésion aux dépens des autres. Tout au moins en termes de fréquence. Nous avons ainsi différentes combinaisons, alternant les singuliers ou les pluriels, entre :
Treat :
- Bonbon
- Gâterie
- Confiserie
- Friandise
- Gourmandise
Trick :
- Tour (mauvais tour)
- Sort (mauvais sort)
- Blague (méchante blague)
- Farce
- Bêtise
- Bobos
- Malédiction
Les bonbons ont bien sûr la palme de l'usage, vu que les missions "bonbons" ont un succès bien compréhensible chez les enfants.
- Des bonbons ou une farce
- Des bonbons ou un sort
- Des bonbons ou des tours
- Des bonbons ou des mauvais tours
- Des bonbons ou des bobos
- Des bonbons ou la vie
- Un bonbon ou une malédiction
- Farces ou friandises
- Des confiseries ou on vous jette un sort
- Des friandises ou des bêtises
J'ai même trouvé "un sort ou une gâterie", sans oublier un pittoresque "file du blé ou j'te pète ta race !"
Mes préférés parmi ceux qui respectent davantage les critères de départ sont « Des friandises ou des bêtises », et, naturellement, « Des bonbons ou des bobos » : dire friandises ou bêtises ?, bonbons ou bobos ?, ce serait même encore plus direct !
C'est d'ailleurs bien plus joli sans articles : farce ou bonbons "sonne" cent fois mieux que "des bonbons ou une farce"...
[Mise à jour, 31 octobre 2013] "Trouille ou citrouille", ça serait pas mal non plus ! [Début]
Espagnol
Treat :
- Trato
- Dulce
- Sorpresa
Trick :
- Trampa
- Treta
- Travesura
- Truco
- Broma
Il me semble que la plus utilisée soit « treta o trato », qui respecte aussi les caractéristiques de l'anglais, y compris dans l'ordre des termes.
En effet, dans :
- Trick or Treat (anglais)
- Bonbons ou bobos (mon préféré en français)
- Dolcetto o scherzetto (italien)
- Süßes oder Saueres (allemand)
- Treta o trato (espagnol)
nous avons en anglais et en espagnol la composante "négative" (trick) en premier, alors que dans les autres langues c'est le contraire. Ceci dit, pour chaque langue, il est évident que la phonétique joue un rôle primordial dans la disposition des termes. Dans ce sens, le français pourrait également s'adapter en « farce ou bonbons » !
Sans oublier que, dans toutes les langues du monde, ce sont des enfants qui prononcent cette phrase. :-)
Voilà. Si quelque lectrice ou lecteur veut bien compléter cette réflexion linguistique en ajoutant des remarques ou en donnant des exemples dans d'autres langues, les commentaires vous sont ouverts. [Début]
Postface. Ce que font les enfants le soir d'Halloween !
Chaque 31 octobre, veille magique de la Toussaint, les rues se parent de citrouilles, de toiles d’araignée et de rires d’enfants : c’est Halloween, la nuit où les déguisements deviennent sortilèges.
Sur les perrons, des jack-o’-lanterns grimaçantes clignotent déjà comme des balises, tandis que les guirlandes de chauves-souris en papier battent des ailes au moindre souffle.
Déguisements, costumes et maquillage
Les chambres éclairées se transforment en coulisses du tournage à venir pour les héros de fortune. On ajuste des capes et des chapeaux pointus, on remet droit un bandeau de pirate, on vérifie des canines en plastique avec un sérieux d’orfèvre, on trace des moustaches et des cicatrices : l’instant où l’ordinaire bascule dans le jeu. La citrouille taillée la veille s’illumine : la bougie vacille, l’ombre danse sur les murs, et soudain tout ressemble à un décor — frisson léger, version sucrée.
La grande tournée des petits ducs
Dehors, la rue devient un joyeux défilé. On marche en grappes serrées, un parent ou deux en escorte discrète. Les portes qui affichent araignées en papier, guirlandes orange, épouvantails plantés de travers ou petits cimetières en carton plein de pierres tombales penchées, sont autant de signaux clairs : on peut frapper. À intervalles réguliers, la formule rituelle fuse, rarement synchro mais toujours joyeuse : « Des bonbons ou un sort ! »
Parfois on reçoit un sourire et une poignée de caramels ; parfois un voisin joue la comédie, lance un « Bouh ! » tonitruant suivi d’un hurlement ravi, puis cède une grosse poignée de chocolats, traité de paix signé sur du papier brillant.
On compare les butins entre deux maisons. Les plus petits négocient déjà : deux sucettes contre une barre au chocolat, « parce que moi j’aime pas le citron ».
Les plus grands font semblant d’être blasés mais serrent leur sac comme un trésor. On croise un zombie qui traîne un pied, une momie emmaillotée trop court, un loup-garou qui teste son hurlement, et, plus loin, un Spider-Man qui remonte son masque pour mordre dans un bonbon. Quelqu’un distribue même des triangles jaune-orange-blanc, curiosités sucrées importées.
Il y a toujours un jardin trop décoré qui fait hésiter. Ce soir, c’est celui-là : squelette grinçant, main animée sur une table, drap blanc suspendu à la branche d’un arbre. Dans un coin, un chaudron en plastique fume d’une potion verte de gélifiés ; un balai appuyé au mur attend la relève. On rit, on crie, on avance quand même, le courage, ça motive. Au bout de l’allée, trois amis s’arrêtent : l'une, tresses rousses, filet à papillons brandi comme un attrape-fantômes ; l'autre, vampire rockeur avec guitare en carton, et la troisième, une fée bienveillante au chapeau piqué de plumes. Ils se regardent, complotent entre signes de tête et mines angoissées.
Les Gardiens des Souvenirs
La rumeur du village prête ses mille secrets à cette maison sur la colline, aux fenêtres qui brillent comme des yeux. Le portail rouillé gémit quand on le pousse. Dans le jardin, des citrouilles affaissées et de vraies toiles d’araignée. La porte s’entrouvre d’elle-même. Un couloir tapissé de papier jauni, des bougies qui tremblent toutes seules, et, au centre, une table dressée d’une nappe blanche. Les enfants hésitent, puis s’assoient, parce que parfois la peur ressemble à une invitation.
– Asseyez-vous, voyageurs d’Halloween, murmure une voix douce, venue de nulle part.
Des silhouettes se dessinent : une vieille dame en robe victorienne, un petit garçon en drap de fantôme,
un chat noir aux yeux verts, rien de méchant, juste du folklore.
– Nous sommes les Gardiens des Souvenirs, dit la vieille dame. Ici, on n’effraie pas : on se souvient.
Chaque 31 octobre, on échange. Vous racontez votre Halloween, on vous rend une petite magie.
Le chat saute sur la table, queue en point d’interrogation.
Les enfants racontent leur aventure chocolatée. Ils rient, se coupent, se corrigent, ajoutent des détails inutiles et donc précieux. Les silhouettes écoutent, sourient, deviennent plus nettes, comme si chaque détail était une pièce du puzzle qui les ramène. Dehors, la brume s’est levée et la pleine lune découpe les toits ; même les capes prennent de l’ampleur. Le village poursuit sa ronde de lumières et de rires.
Puis, de retour dans la rue, tout redevient simple pour le petit trio. Les sacs pèsent lourd. On redescend la colline, on retombe dans le flot des cliquetis de seaux, des parades improvisées, des « trick or treat ! » polyglottes, des concours de costumes, des chasses aux pommes dans l’eau du jardin des voisins, labyrinthes hantés tracés à la lumière de poche.
Retour à la maison : le tri du butin et le marchand de sable
Après 20h, on rentre à la maison. Chez soi, l’ultime rituel commence : on renverse le sac sur la table, on fait des piles (choco / gélifiés / « à donner aux parents »), on invente des règles discutables (« un par jour », « sauf le week-end »), on raconte les meilleurs accueils, les petites frayeurs, les fous rires. On garde le maquillage jusqu’au brossage des dents, on éteint la citrouille qui fume encore un peu, on promet que l’an prochain, le costume sera « encore plus incroyable ».
Dans leur chambre, après avoir glissé leur chapeau sous le lit — sait-on jamais, les chapeaux aiment voyager —, les petits s'endorment, paisibles, la tête bruissant de frissons de papier, des rires dans la rue, des pas qui craquent sur de vieux parquets délabrés.
La fin de la fête et la promesse de l’an prochain
La nuit peut retomber. Restent sur le trottoir trois confettis de citrouille, un faux croc oublié, une paillette de fée. Et la sensation très nette qu'en l'espace de quelques heures, le monde s’est prêté au jeu : il a réglé ses horloges sur l’enfance et laissé les portes s’ouvrir.
La clochette, dit-on, a tinté plus tard, pas d’un son, mais d’un souvenir : celui d’un courage partagé, tressé d'un ensemble d'amitiés et de craintes enfantines — à plusieurs, on ose —, d’ombres apprivoisées, d’une poignée de bonbons gagnés à force de « s’il vous plaît ». Toutes ces années après — Paolo avait 7 ans — les friandises sont toujours là, autres couleurs, autres formes, autres goûts, mais les rires et les sorts, eux, traversent le temps et poursuivent leur chemin.
























